Entre deux adaptations live de leur grand classique de l’animation, les producteurs de chez Disney retentent l’expérience de porter à l’écran un long-métrage se basant sur l’une des attractions de leurs parcs à thèmes, six ans après le semi-échec d’À La Poursuite De Demain (Tomorrowland) de Brad Bird, portant leur dévolu sur Jungle Cruise. Pour mener à bien ce projet, Jaume Collet-Serra a été appelé à la barre afin de diriger Dwayne Johnson, Emily Blunt, Jack Whitehall, Edgar Ramirez, Jesse Plemons et Paul Giamatti sur les flots de l’aventure, embarquant ce beau monde pour une mystérieuse quête le long du fleuve Amazone…

Habitué des actioners aux côtés de son comparse Liam Neeson (leur collaboration comprend Sans Identité, Non-Stop, Night Run et The Passenger) – Jaume Collet-Serra s’autorise une virée vers un autre genre en prenant la barre d’un blockbuster familial destiné à donner des envies d’ailleurs avec Jungle Cruise. Un long-métrage calibré pour réitérer l’exploit perpétré par Disney aux débuts des années 2000 avec Pirates Des Caraïbes, qui avait su prendre le large avec succès et a donné naissance à une licence lucrative. Pari réussi ? Plus ou moins.

En prenant la même recette du film de Gore Verbinski, tout en y insufflant un parfum d’aventure à l’ancienne en lorgnant du côté d’À La Poursuite Du Diamant Vert de Robert Zemeckis ou encore de L’Odyssée De L’African Queen de John Huston – qui pour la petite histoire a servi de base à la conception de l’attraction de Disneyland – le réalisateur ainsi que les scénaristes John Requa et Glenn Ficarra se reposent sur un cocktail qui a déjà fait ses preuves, où humour et morceaux de bravoures s’enchaînent à un rythme soutenu, mais pour le mélange soit efficace encore faudrait-il avoir assez d’inspiration et d’énergie pour que le voyage proposé à l’écran possède une saveur particulière. Fort heureusement, en ce qui concerne l’énergie, l’ambition est au rendez-vous, la croisière à laquelle nous prenons part étant des plus mouvementées.

Long-métrage aux allures de montagnes-russes, Jungle Cruise nous propose un périple voguant à vive allure sur la rive des péripéties, ne perdant pas un instant pour capter l’attention de son auditoire. En deux temps trois mouvements, les dés sont lancés et les enjeux éclaircis avec en ligne de mire la quête d’un MacGuffin en Amérique du Sud, en l’occurrence un arbre aux vertus miraculeuses, qui pourrait sauver d’innombrables vies à une époque aussi troublée que celle de la Première Guerre Mondiale. Cet ‘artéfact’ mystique aux propriétés hors du commun est l’objet de toutes les convoitises, nous amenant à ce périple le long du fleuve Amazone que nous suivons à travers les recherches de la doctoresse Lily Houghton et de son frère McGregor, qui s’embarquent tête baissée vers le danger aux côtés Frank Wolff, skipper peu orthodoxe d’un raffiot plus ou moins mal en point. Un trio que tout oppose, qui vont devoir apprendre à coexister pour faire face aux nombreux obstacles se mettant sur leur chemin.

Devant respecter un cahier des charges un brin épais, le film tire en longueur malgré une première partie sympathique à regarder, ce que l’on doit à l’alchimie de notre équipage principal, les joutes verbales entre Emily Blunt et Dwayne Johnson fonctionnant plutôt bien de même que l’humour pince sans rire de Jack Whitehall, venant ainsi renforcer cette atmosphère bon enfant distillée via les élucubrations de ces protagonistes diamétralement opposés. Entre répliques bien senties et comique de situation, la légèreté est au programme, ce qui n’est pas pour déplaire puisque cette bonhommie et cette roublardise qui viennent contrebalancer une intrigue se diluant au fil de l’eau, se mettant à recycler allègrement Pirates Des Caraïbes dans ses derniers actes, où une malédiction vient relancer maladroitement la machine, dont le régime moteur s’affaiblit. La redondance des évènements vient ternir le voyage, d’autant plus lorsque un némesis aussi caricatural que celui incarné par Jesse Plemons – qui doit malheureusement composer avec peu – vient parasiter l’ensemble.

Ajoutons à cela un parti-pris visuel qui fait clairement mal aux yeux et n’invite pas à l’exotisme, la profusion du tout CGI venant clairement mettre un coup de frein à l’imagination avec cette image lisse et ces décors composés par ordinateurs qui enlèvent un charme non négligeable à notre immersion, le genre étant souvent propice au dépaysement, à l’émerveillement. Pour en revenir une dernière fois sur Pirates Des Caraïbes, dont l’inspiration n’est plus à démontrer, Jaume Collet-Serra n’est pas Gore Verbinski (aux manettes des trois premiers opus de la saga) et cela se voit à l’écran car, même s’il se débrouille très bien en terme d’action – avec des séquences divertissantes à la clé – niveau mise en scène son recours à une utilisation plus qu’excessive aux effets spéciaux générés virtuellement, qui nous font décrocher de son long-métrage en fin de parcours, avec une conclusion brouillonne au niveau de la mise en scène. Ce qui est dommage vu le pharaonique budget alloué à ce roller-coaster maritime.

S’il est clair sur son intention, qui est de proposer un grand spectacle sans prise de tête à un public en manque de sensations fortes, Jungle Cruise pâtit quelque peu de son scénario en dents de scie et d’une réalisation tout-GCI qui s’avère visuellement irritante pour réellement devenir le divertissement estival qu’il aurait aimé être. Si Jaume Collet-Serra tente d’insuffler un souffle épique à son blockbuster, ce qui fonctionne aléatoirement, ce qui empêche celui-ci de réellement prendre l’eau et de sombrer dans l’oubli est l’engagement du trio Emily Blunt/Dwayne Johnson/Jack Whitehall, qui prennent part avec enthousiasme à cette aventure, leur alchimie venant rehausser le niveau.

© Disney

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