[Critique] Vincent doit mourir, dans l’œil du chaos
Après avoir fait ses armes dans le cinéma à travers divers courts-métrages, le dernier en date étant Panthéon discount (2017), Stéphan Castang passe au format long avec Vincent doit mourir. […]
Pour ceux qui se font des films en séries
Après avoir fait ses armes dans le cinéma à travers divers courts-métrages, le dernier en date étant Panthéon discount (2017), Stéphan Castang passe au format long avec Vincent doit mourir. […]
Après avoir fait ses armes dans le cinéma à travers divers courts-métrages, le dernier en date étant Panthéon discount (2017), Stéphan Castang passe au format long avec Vincent doit mourir. Réunissant Karim Leklou, Vimala Pons, François Chattot, Karoline Rose Sun ou encore Jean-Rémi Chaize au casting, ce premier film se concentre sur les déboires d’un graphiste se voyant aspiré contre son gré dans une spirale infernale…
Pour son incursion dans le domaine du septième art, Stéphan Castang frappe un grand coup et ce sans mauvais jeu de mots, naviguant entre les genres pour proposer avec Vincent doit mourir, une virée survivaliste teintée d’humour noir s’interrogeant sur l’aliénation d’une société aux portes de l’effondrement. Tantôt brutal, tantôt ironique, ce premier essai marche avec une certaine assurance sur un fil ténu, sachant immerger le spectateur dans un univers sous influences d’où flottent les esprits de John Carpenter et George A. Romero.
Pour dénoncer un monde se repliant sur lui-même et se laissant aller à ses pulsions primaires, le cinéaste joue avec les codes du thriller, où la tension et la paranoïa s’entremêlent pour mieux brouiller les lignes de fuite offertes à ses personnages, des quidams se retrouvant embarqués dans une situation dépassant les limites du raisonnable. Quand son prochain devient une menace, comment continuer à mener une vie paisible ? Telle est la question initiale posée par le script écrit par Castang et son coscénariste Mathieu Naert, qui s’évertue à se concentrer sur le calvaire plutôt cocasse réservé à leur protagoniste, un homme à priori sans histoire devenant du jour au lendemain une cible de choix pour ceux qui l’entoure. Que ce soit au travail ou dans la rue, ce dernier se fait attaquer violemment et sans raison, une situation inexplicable le repoussant dans ses retranchements. Ou comment d’un regard, tout peut basculer et s’embraser.
Traité dans un premier temps avec un certain sens du second degré, tant ces déboires paraissent improbables, le chemin de croix s’imposant à ce pauvre Vincent devient progressivement sinueux et sombre, avec en prime une atmosphère anxiogène pour couronner le tout. Livré à son sort, notre victime ne peut que constater l’hostilité de son environnement et prend des solutions drastiques pour échapper à la rage de ses agresseurs, pouvant subvenir de n’importe qui. Sachant tirer profit de son concept, qu’il n’explicite pas (un excellent choix) Vincent doit mourir parvient à rester solide sur ses appuis, réussissant à élargir son champ de vision alors que ce qui était une course en solitaire tourne au pas de deux tragi-comique. L’entrée en scène du personnage de Margaux qui, comme Vincent est à la marge de la société, donne d’ailleurs du corps à l’intrigue et permet d’instiller un peu de lumière dans cette œuvre en clair-obscur, dépeignant le déclin d’une humanité se laissant glisser sur la mauvaise pente à vitesse grand V.
Ce qui donne lieu à une fuite en avant se nourrissant du chaos pour avancer à bon rythme, le tout en dépit des nombreux nids de poules se trouvant sur le bitume. qui secouent bien comme il faut. Pour bien faire, Stephan Castang a un goût prononcé pour le coup d’éclat et aligne les séquences déstabilisantes de manière habile, aimant jouer sur les attentes – notamment dans la seconde partie du film – afin de provoquer l’étincelle qui allume cet incendie incontrôlable dévastant tout sur son passage. En plus de savoir soigner sa mise en scène, qui ne détourne pas le regard de la violence, le réalisateur dirige avec tact Karim Leklou et Vimala Pons, qui forment un tandem d’infortune tourmenté mais attachant, que l’on suit avec attention au milieu de ce bourbier d’où il est difficile d’en sortir indemne.
Avec Vincent doit mourir, Stéphan Castang frappe un grand coup, plongeant les excellents Karim Lekmou et Vimala Pons dans l’œil du chaos via un survival anxiogène mais non dénué d’humour noir. Une proposition surprenante – dans le bon sens du terme.