Quatre ans après avoir passé le relais à Juan Antonio Bayona, Colin Trevorrow reprend la main sur la saga Jurassic World en passant à nouveau derrière la caméra pour clore la trilogie qu’il a initié. Au programme de cet ultime chapitre, sous-titré Le Monde d’Après et comprenant Chris Pratt, Bryce Dallas Howard, Sam Neill, Laura Dern, Jeff Goldblum, DeWanda Wise, Mamoudou Athie, Isabelle Sermon, B.D Wong ou encore Omar Sy au casting, une mission pour empêcher un futur désordre mondial, à une ère où humains et dinosaures partagent le même territoire…

Quel moustique a piqué Colin Trevorrow ? Après deux opus, à la qualité aléatoire certes mais avec des atouts dans leur poche, le cinéaste loupe carrément le coche en refermant les portes de Jurassic World sur une note pour le mois amère, dénaturant l’essence même de la saga en oubliant son ingrédient principal – les dinosaures – préférant se diriger vers d’autres horizons pour le plus grand regret du spectateur. Un comble lorsque l’on se remémore des éléments précédemment mis en place, qui préfiguraient d’un changement de paradigme alléchant entre l’Homme et nos créatures préhistoriques. Avec Le Monde d’Après, l’expression l’éléphant qui accouche d’une souris prend tout son sens, ce qui est dommage.

Rappelez-vous, durant la promotion du long-métrage, un prologue prétendait annoncer la couleur de ce grand final (que vous pouvez redécouvrir ici) en mettant en avant les vraies vedettes de la franchise, faisant un parallèle entre leur cohabitation entre espèces au jurassique puis à l’époque moderne – suite aux événements de Fallen Kingdom. Un avant-goût d’une cohabitation forcée changeant la face du monde et amenant l’équipe créative sur un chemin inédit, ce qui avait de quoi intriguer. Hélas, trois fois hélas, oubliez ces images de même que cette promesse d’un jour nouveau, l’intrigue concoctée par Colin Trevorrow, Emily Carmichael et Derek Connolly s’évertuant à déterrer les graines semées pour s’orienter vers un tout autre sujet. Une décision pour le moins saugrenue et difficile à comprendre lorsque l’on voit le résultat, frôlant le hors-sujet.

Evoquer les déséquilibres pouvant mettre à mal l’avenir de cette chère planète bleue dans laquelle nous existons a un potentiel certain, les questions environnementales prenant une place de plus en plus prépondérante dans notre quotidien – à raison – mais pourquoi diable ne pas l’avoir développée à travers le prisme des dinosaures ? La thématique avait tout de même été amorcée dans l’épisode précédent avec ce lâcher en pleine nature de nos animaux modifiés génétiquement, ce qui rend illogique cette volonté de repartir sur des bases fraîches. En résulte un scénario qui oublie dans les grandes lignes ce qui faisait l’essence de Jurassic Park/World, préférant s’engouffrer dans deux histoires parallèles destinés à réunir dans un acte final les deux générations de héros de la mythologie dérivée de l’œuvre de Michael Crichton. Sauf que ces routes empruntées sont accidentogènes et malheureusement, Trevorrow ainsi que ses comparses ne maitrisent pas leur véhicule.

Autant le dire tout de suite, Jurassic World : Le Monde d’Après n’est pas un navet, niveau blockbusters nous avons vu pire dernièrement. Son problème est qu’il se révèle extrêmement frustrant, étirant inutilement en longueur un récit qui ne méritait pas tant de déviations, son ambition étant simpliste. D’un côté, un enlèvement, de l’autre les dégâts causés par des sauterelles mutantes, au milieu, le PDG d’une multinationale assoiffé de pouvoir. De quoi progressivement attirer notre casting vers un ennemi commun et provoquer l’étincelle d’une réunion tant attendue, avec du fan-service en guise de sucrerie, plus ou moins dosé. Il n’y a pas à dire, même s’ils n’ont pas un matériau à la hauteur de leur talent, Sam Neill, Laura Dern et Jeff Goldblum savent faire le show et s’avère être la seule attraction de cette pause récréative partant parfois dans tous les sens – éclipsant non sans mal Chris Pratt et Bryce Dallas Howard.

Et les dinosaures dans tout cela ? Nos stars en sont réduits à être personnages secondaires qui, majoritairement, n’aident qu’à alimenter les séquences d’actions égrainant le film, essayent d’insuffler un supplément d’âme à une grosse production qui en manque cruellement. Contrairement à J.A. Bayona, dont le sens de la mise en scène aidait à croire un minimum à ce qu’il se passait à l’écran, Colin Trevorrow persiste à aller droit au but sans chercher à travailler ses plans, ni à donner de l’ampleur à sa réalisation – ce qui est regrettable. Singer Spielberg ne fait pas tout. Le champ des possibles était énorme avec la présence des dinos sur la surface du globe, avec de possibles conséquences chaotiques et des dérives, mais cela a seulement été effleuré. Tout simplement rageant.

Si tout n’est pas à jeter, l’alchimie de nos ‘legacy characters’ et quelques séquences musclées faisant un minimum le job, Jurassic World : Le Monde d’Après clôt de manière indélicate une trilogie qui méritait mieux – malmenée par son principal artisan, Colin Trevorrow. Entre les mains du cinéaste, cette continuité de Jurassic Park a connu des hauts et des bas mais avec cet ultime volet, les choses se sont empirées, les quelques bonnes idées présentes se voyant annihilées par des choix incompréhensibles de la part du cinéaste en terme d’écriture. On évite la catastrophe totale de peu mais les dégâts sont malgré tout importants, un constat qui ne manquera pas de heurter bon nombre de fans de la franchise. Chaos finds a way.

© Universal Pictures

1 commentaire »

  1. Pour ma part, « Jurassic World Dominion » est un bon film de science-fiction disposant d’une histoire basique, d’une intrigue légère et d’un développement familier. Le rythme est soutenu, le récit est fluide et la narration est linéaire. La mise en scène signée Colin Trevorrow offre une sensation de réchauffé pour plusieurs séquences. La photographie est agréable, les effets spéciaux sont excellents, la bande musicale est plaisante et le montage est dynamique. La distribution offre de bonnes prestations dans l’ensemble, même si on se demande pourquoi certains personnages sont encore présents. Toutefois, notre préférence ira chez Jeff Goldblum pour son excentricité mesuré. L’ensemble se laisse regarder, mais il serait temps de mettre un terme à cette franchise, à moins d’y apporter de l’originalité autre que la multiplication des variantes de dinosaures…

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