Deux ans après Mademoiselle de Joncquières, Emmanuel Mouret est de retour derrière la caméra avec Les Choses Qu’on Dit, Les Choses Qu’on Fait, qui comprend au casting Camélia Jordana, Niels Schneider, Vincent Macaigne, Emilie Dequenne, Jenna Thiam ou encore Guillaume Gouix et se centre sur le parcours amoureux d’une galerie de personnages…

Après une parenthèse historique, qui se mariait à merveille avec son style verbeux et littéraire, Emmanuel Mouret revient à notre époque avec Les Choses Qu’on Dit, Les Choses Qu’on Fait, pour parfaire son analyse du sentiment amoureux et nous convier à un pas de trois sensible et singulier.

Le réalisateur/scénariste nous convie à un marivaudage qui se veut plus approfondi qu’à l’accoutumée, pour un conte moral doux et sincère centré sur le triangle amoureux. Renouant avec la structure narrative d’Un Baiser S’il Vous Plaît, Emmanuel Mouret traite ainsi des relations humaines à travers des récits racontés par les personnages eux-mêmes, mettant en exergue leurs faiblesses et leurs fêlures. Dans le cadre de Les Choses Qu’on Dit, Les Choses Qu’on Fait, le désir et la déception prennent une place prépondérante dans l’introspection et les interrogations de nos protagonistes tandis que nous est exposé la notion de fidélité, une problématique avec pudeur et non sans une certaine ironie.

Les amateurs du cinéaste seront conquis par cette nouvelle œuvre, qui reprend les ingrédients ayant forgé sa filmographie. Que ce soit la précision des dialogues, écrits au cordeau ou l’abondance de la musique classique, les notes d’artistes classiques (tels que Mozart, Chopin,…) ajoutant lyrisme à cette valse des sentiments, Emmanuel Mouret se complaît dans ses domaines de prédilection et parvient à livrer son film somme. Par le biais d’une mise en scène soignée et délicate, permettant de mettre en lumière sa direction d’acteur, ce dernier laisse ainsi le champ libre à ses acteurs et actrices, leur partition intimiste aidant le public à se laisser porter la puissance dévastatrice de l’amour.

Pendant plus de deux heures, nous nous laissons cueillir par cette chronique sentimentale et ces destins qui s’entrecroisent par l’intermédiaire d’une rencontre, celle de Daphné et Maxime. Deux êtres qui ne se connaissent pas, devant apprendre à tisser des liens en attendant le retour de leur comparse, François, compagnon de la première et cousin du second. Avec comme seule échappatoire la discussion, chacun va se présenter à l’autre – et au spectateur – par le prisme de la réminiscence, ressassant un passé peu glorieux relationnellement parlant. Mêlant douceur et amertume, le scénario se veut une balade mélancolique dans l’univers du désir et de sa difficulté à l’assouvir, impliquant un jeu de l’amour et du hasard se montrant cruel pour tous ses participants, chacun étant pris au piège par les rouages propres au ménage à trois. Ce chemin vers les espoirs déçus est ce qui fait le sel de cette nouvelle œuvre d’Emmanuel Mouret et maintient notre intérêt quant à ce chassé-croisé amoureux, qui emprunte des sentiers tortueux dans sa dernière partie pour mieux appuyer son propos quant à la fatalité et le cercle sans fin de l’infidélité.

N’oubliant pas de donner la part belle à son casting, Les Choses Qu’on Dit, Les Choses Qu’on Fait doit beaucoup à la sincérité émanant de son duo central, interprété par Niels Schneider et Camélia Jordana. Grâce à leur interprétation à fleur de peau, ils rendent leur alter-ego attachant, un affect aidant à l’immersion du spectateur dans leur parcours romantique, aussi mouvementé soit-il. Concernant les seconds rôles, si Vincent Macaigne, Jenna Thiam et Guillaume Gouix ajoutent un cachet non négligeable à ce marivaudage où le pas de trois est de rigueur, la véritable surprise est la prestation sensible et solide d’Emilie Dequenne, dont le rôle prend tout son sens dans la deuxième partie du film et démontre qu’il ne faut négliger aucun sommet d’un triangle, chacun étant impacté par cette géométrie du cœur.

Avec Les Choses Qu’on Dit, Les Choses Qu’on Fait, Emmanuel Mouret parachève avec pudeur et délicatesse son examen de la relation amoureuse, nous livrant ici le chapitre le plus maîtrisé de son étude sur la puissance – à la fois libératrice et dévastatrice – du désir.

© Pascal Chantier / Moby Dick Films

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