Depuis la parenthèse Les Gardiens de la Galaxie : Joyeuses Fêtes de cet hiver, Marvel Studios s’est plutôt faite discrète sur le petit écran, attendant sagement le bon moment pour démarrer comme il se doit la partie télévisuelle de sa Phase 5, qui devrait normalement offrir une caisse de résonnance particulière à ce gros chapitre en cours de lecture qu’est The Multiverse Saga. Avant de retrouver Carol Danvers, Monica Rambeau et Kamala Khan dans The Marvels, attendu pour le mois de novembre au cinéma, Kevin Feige et ses équipes revisitent Secret Invasion, un arc important au sein de la Maison des Idées en compagnie d’un casting quatre étoiles réunissant Samuel L. Jackson, Ben Mendelsohn, Emilia Clarke, Kingsley Ben-Adir, Don Cheadle, Olivia Colman, Cobie Smulders ou encore Martin Freeman.

Ralentissant la cadence après une année 2022 des plus rythmée, avec pas moins de quatre productions au compteur (MoonKnightMiss MarvelJe s’appelle GrootShe-Hulk), Marvel Studios cherche à (re)créer l’événement et pensait y parvenir avec sa relecture d’un célèbre run imaginé par le scénariste Brian Michael Bendis à la fin des années 2000, où la menace Skrulls prenait un tout autre visage et perturbait l’équilibre mondial. Si le MCU n’est pas aussi fourni que son pendant dans l’univers des comics, cela n’a pas empêché le showrunner Kyle Bradstreet et ses scénaristes d’évoquer cette invasion en prenant un angle différent, se recentrant sur une poignée de personnages dont Nick Fury et Talos en priorité. Mais en réduisant le champ de vision de cette intrigue des plus fournies, Secret Invasion peut-il avoir un réel impact ? Après visionnage de la série, la réponse est malheureusement négative.

Depuis la Phase 4, force est de constater que l’Univers Cinématographique Marvel se disperse plus que de raison, la multiplication de projets interconnectés entre le cinéma et la plateforme Disney + finissant par montrer ses limites, épuisant les talents devant et derrière la caméra. Le format sériel ne paraît pas des plus adéquats pour développer des storylines majeures, ce que l’on ne peut que constater au gré de cette nouvelle création originale, qui fait pâle figure face à son modèle. Ici, le manque de vision de Kevin Feige quant à la problématique Skrulls, à peine effleuré depuis l’introduction de la nation alien dans Captain Marvel s’expose au grand jour, les enjeux politiques que devaient engendrer ce jeu de dupes n’ayant aucune teneur, aucun souffle, la faute à une structure narrative brouillonne, reposant sur des fondations branlantes. Difficile de croire en ce conflit sous-jacent entre diverses factions de la nation alien en l’absence de signes avant-coureurs laissant craindre à cette escalade de violence dont nous sommes témoins.

Ainsi, la machination fomenté par Gravik et ses dissidents ne peut réellement surprendre quant tout tombe comme un cheveu dans la soupe. Les raisons de la colère de ces exilés auraient pu être pertinentes si le terrain avait été correctement préparé en amont, ne serait-ce qu’au détour d’une scène à priori anodine dans l’un des récents longs-métrages de la firme. La lutte se mettant en place entre Talos et ses pairs, décidés à faire parler la poudre après des décennies à se voir promettre une terre d’accueil qui n’existe pas, aurait pu se révéler cruciale mais à cause d’une écriture brouillonne tout du long des six épisodes que compte la série, celle-ci se montre au final basique. Si revoir Nick Fury est plaisant, Samuel L. Jackson étant d’ailleurs l’atout numéro un de Secret Invasion, il est dommage que l’échiquier sur lequel il avance soit si balisé, ne lui offrant que trop peu moment pour briller. Verser dans le domaine de l’espionnage et de la conspiration était en soi une bonne idée de départ, surtout connaissant la nature métamorphe des Skrulls mais le résultat fait peine à voir, les ficelles tirées par Kyle Bradstreet et ses auteurs cassant rapidement.

Faute d’une intrigue solide, les cartes censées nous surprendre font l’effet d’un pétard mouillé, ce qui est dû à cette impréparation. Parmi les nombreux coups foireux, le sort réservé à Maria Hill mais surtout à Rhodey, qui aurait eu un potentiel certain si des indices – subtils – avaient été disséminés ci-et-là. Tout semble sortir aléatoirement d’un chapeau, annihilant toute tentative d’instaurer cette fameuse ambiance paranoïaque que l’on nous avait vendu. Certes on nous remet Nick Fury en selle mais cette consolation est des plus maigres, surtout lorsque l’on sait que l’on est passé à côté d’un arc des plus importants et marquant de l’histoire récente de Marvel rayon comics. Un coup d’épée dans l’eau plutôt rageant, d’autant plus lorsque des pistes intéressantes sont balayées d’un revers de la main, à l’image des Super-Skrulls, une idée expédiée en deux temps trois mouvement dans un ultime épisode enchaînant les facilités. Un beau gâchis, aussi bien côté scénario que réalisation (212M$ de budget, vraiment ?) dont on ne retiendra que les prestations d’un casting se démenant comme il peut face à un matériel peu avenant, à commencer par Samuel L. Jackson certes mais également Ben Mendelsohn, Emilia Clarke sans oublier la toujours pétillante Olivia Colman – qui procure ce léger vent de fraîcheur bienvenue dans cette morne production et que l’on a hâte de revoir.

Embourbée dans une intrigue anti-spectaculaire et brouillonne, Secret Invasion loupe le coche, échouant d’être l’événement télévisuel voulu par Marvel Studios en dépit d’un casting de premier ordre.

Nick Fury s’en va-t-en guerre

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