[Critique] L’Année du requin, entre deux eaux
Un an après Teddy, Ludovic et Zoran Boukherma sont de retour derrière la caméra avec L’Année du requin, qui comprend au casting Marina Foïs, Kad Merad, Jean-Pascal Zadi, Christine Gautier, […]
Pour ceux qui se font des films en séries
Un an après Teddy, Ludovic et Zoran Boukherma sont de retour derrière la caméra avec L’Année du requin, qui comprend au casting Marina Foïs, Kad Merad, Jean-Pascal Zadi, Christine Gautier, […]
Un an après Teddy, Ludovic et Zoran Boukherma sont de retour derrière la caméra avec L’Année du requin, qui comprend au casting Marina Foïs, Kad Merad, Jean-Pascal Zadi, Christine Gautier, Jean Boronat, Philippe Prevost ou encore Ludovic Torrent et se centre sur le parcours de Maja, gendarme maritime dans les landes devant faire face à une menace venue des profondeurs…
Poursuivant sur la lancée de leur deuxième long-métrage, Teddy, Ludovic et Zoran Boukherma sillonnent le cinéma de genre avec un style qui leur est propre, s’intéressant cette fois à un autre monstre sacré du septième art – en l’occurrence le requin – pour une baignade dans un bassin bien trop grands pour leurs épaules, qui résulte en un long-métrage en dents de scie, ne sachant pas sur quel pied danser pour allier humour et frissons.
S’il se démarque en étant la première production hexagonale à s’aventurer dans ces eaux, L’Année du requin ne restera malheureusement pas dans les annales malgré les bonnes idées émaillant cet ersatz des Dents de la Mer en mode franchouillard, la faute à ce qui ressemble à un manque de confiance de la part de nos deux frères, qui perdent parfois pied dans ce vaste terrain de jeu dans lequel ils s’engouffrent. En conviant tour à tout l’esprit de Steven Spielberg et de Bruno Dumont, le duo de cinéastes cherche à créer une atmosphère particulière, où derrière la pantalonnade de façade se noue un drame humain, l’émergence d’une menace sous-marine exacerbant les tensions à la surface. Un partis-pris non dénué de potentiel, pouvant permettre de surfer sur une vague des plus instables – ce qui demande du tact dans le traitement d’un sujet abordé de long en large au cinéma.
Lorsque la silhouette d’un aileron fait son apparition sur la côte landaise, l’interrogation est de mise pour la population et les autorités, jamais confrontés à la présence d’un requin à un tel endroit. La découverte d’un cadavre va confirmer ce qui n’était qu’une rumeur et bouleverser la quiétude d’une station balnéaire en pleine période estivale. L’occasion idéale pour que notre personnage principale, Maja, tire un trait sur sa retraite anticipée et s’affaire à une dernière mission pour la route, au grand dam de son mari. Sachant pertinemment qu’ils reprennent une trame classique, Ludovic et Zoran Boukherma tentent de tirer leur épingle du jeu grâce à leur patte particulière, un second degré teinté d’acidité – alimentant dans ce cas précis un conte moral destiné à dézinguer l’égoïsme de notre société, qui ne se préoccupe que de son nombril face aux dangers alentours. Le tour de piste sanglant du mammifère marin symbolise alors cette inertie et ce je-m’en-foutisme propre à l’Homme, qui ne doit son salut qu’à l’obstination d’une femme adepte de l’ordre et de la morale.
De bonnes pistes qui, malheureusement ne sont pas suivies jusqu’au bout, la faute à une écriture timorée qui vient déstabiliser le scénario concocté. Tâtonnant d’un bout à l’autre de leur film, les frères Boukherma se prennent de temps à autres une vague en plein visage, les amenant à changer de cap, et ainsi de suite. Quand l’humour tombe à plat, ces derniers prennent un virage plus sombre et s’orientent vers un nouvel itinéraire, en espérant que celui-ci leur montre la marche à suivre. Une oscillation menant à un tangage permanent, mais qui étonnement ne donne pas le mal de mer. De ces expérimentations, L’Année du requin trouve un certain rythme de croisière, les errances s’opérant derrière la caméra donnant du cachet à la bizarrerie se déroulant devant les yeux du spectateur avec notamment une second partie en mode Moby Dick, où l’obsession de Maja pour sa ‘baleine blanche’ l’amène sur un terrain glissant, donnant de ce fait du matériel à Marina Foïs pour proposer une partition plus sombre que prévue, ce qui n’est pas pour déplaire.
En rafraîchissant le climat, les réalisateurs trouvent finalement la tonalité adéquat pour cette histoire de requin, épousant le côté horrifique du genre dans un dernier acte où la tension tente de palier au manque de moyens, ce qui fonctionne plus ou moins. De quoi regretter que les frangins prennent des gants avant de s’immerger entièrement dans le grand bain.
Avec L’Année du requin, Ludovic et Zoran Boukherma poursuivent leur exploration du cinéma de genre dans un style qui leur est propre, livrant un conte moral quelque peu balbutiant, pénalisé par les approximations de son scénario. S’il y a de l’idée, l’exécution n’est pas sans défauts, rendant l’expérience un tantinet lunaire.