Trois ans après Terrible Jungle, la tandem Hugo Benamozig/David Caviglioli débarque sur Prime Video avec leur second long-métrage, Sentinelle. Une production originale Amazon comprenant au casting Jonathan Cohen, Emmanuelle Bercot, […]
Trois ans après Terrible Jungle, la tandem Hugo Benamozig/David Caviglioli débarque sur Prime Video avec leur second long-métrage, Sentinelle. Une production originale Amazon comprenant au casting Jonathan Cohen, Emmanuelle Bercot, Raphaël Quenard, Laurent Evuort Orlandi, Ramzy Bedia ou encore Gustave Kervern et se centrant sur les tribulations du flic le plus médiatique de l’Île de la Réunion – François Sentinelle…
Comme en témoignait leur premier essai, Hugo Benamozig et David Caviglioli ont un univers bien à eux, lorgnant du côté des délires à la ZAZ (le trio Zuicker/Abrahams/Zuicker et non pas la chanteuse) pour nourrir leur cinéma. Une tendance à l’absurde se confirmant avec Sentinelle, qui pousse davantage les curseurs de ce genre de productions, quitte à flirter avec le mauvais goût voir même l’épouser.
Après la Guyane, le duo de réalisateurs nous emmène sur l’île de La Réunion, un havre de paix aux décors de carte postale devenant le théâtre d’un bordel monstre créé par nul autre que notre protagoniste, François Sentinelle qui, tel un ouragan sème le chaos partout où il passe. Un danger public qui ironiquement est en charge de faire régner l’ordre et la justice, au grand dam de la population locale. Connu pour ses méthodes musclées et ses chemises à fleur, poursuivant les criminels à bord de son célèbre defender jaune, cet homme se prenant pour un as de la gâchette – et un chanteur de variété – se révèle n’être qu’un capitaine la bavure, causant plus de torts qu’il n’en répare. Alors quand une enquête pour enlèvement lui tombe sur les bras, ce dernier se retrouve au milieu d’un merdier sans nom, qu’il aide malencontreusement à empirer.
Véritable éléphant dans un magasin de porcelaine, ce héros avec peurs et reproches se veut l’atout phare de cette comédie policière sur le fil du burlesque, de ses exactions reposant l’essentiel de l’humour de celle-ci. Mais dans des pastiches de ce type, il faut savoir doser avec précision ses vannes et trouver un semblant d’équilibre pour tenter de dérider comme il se doit les zygomatiques. Soit un exercice difficile, chaque spectateur répondant différemment aux effets comiques voulus. Dans ce cas précis, le scénario concocté par Benamozig et Caviglioli ne sait malheureusement pas quand s’arrêter, laissant durer plus que de raison la plaisanterie ce qui en diminue son efficacité. En dépit des étincelles provoquées par l’opposition entre Sentinelle et son compagnon d’infortune Morisset, le seul policier compétant des environs, l’enquête nous accaparant n’a que trop peu d’intérêt malgré de bons prémisses, les ficelles quant aux tenants et aboutissants de ce kidnapping politique étant trop grosses.
Dans un sens, nous pouvons comprendre que le but est avant tout de laisser le champ libre à Jonathan Cohen pour nous faire son numéro de grand dadet aussi doué pour résoudre une affaire que pour composer un album, mais emballer un minimum correctement l’intrigue centrale aurait été un plus. Surtout pour ceux qui seraient rapidement irrités par les facéties de François Sentinelle, personnage pour le moins balourd, dont la suffisance et la bêtise prennent le pas sur sa maladresse. C’est sur ce point que les avis divergeront selon les sensibilités, avec cette fameuse question du dosage en terme d’humour. Si l’on démarre sur les chapeaux de roues avec une course-poursuite et le tournage mouvementé d’un clip musical (Est-ce que tu regrettes ? titre qui restera davantage dans les mémoires que le film), Sentinelle a du mal à tenir sur la durée, les vannes perdant de leur saveur à la longue – malgré quelques coups d’éclats de Cohen et de ses comparses pour donner le change.
Il faut dire que le comédien est bien entouré, Raphaël Quenard offrant un bon contrepoids à son abattage, tandis que Emmanuelle Bercot se prend au jeu de la farce, de même que Ramzy Bedia (et sa marionnette), Gustave Kervern ou encore Laurent Evuort Orlandi. De quoi rehausser un tantinet le niveau, la prestation du casting tentant de camoufler une écriture bien grasse, se confortant dans le mauvais goût. L’art de la vanne n’est pas chose aisée mais il est dommage de voir qu’il y avait du potentiel pour se diriger vers un style de comédie anglo-saxon de qualité.
Bourrée de fausses notes, la mélodie jouée par Sentinelle est quelque peu dissonante, la faute aux compositeurs maladroits que sont Hugo Benamozig et David Caviglioli, qui ont cruellement manqué de finesse niveau partition. Pas le navet craint, ce délire déçoit malgré tout car malgré le one man show de Jonathan Cohen, nous ne pouvons que constater un potentiel gâché.