Treize ans après un premier volet signé Jaume Collet-Serra, Esther se pare d’un préquel, cette fois réalisé par William Brent Bell. Comprenant au casting Isabelle Fuhrman, Rossif Sutherland et Julia Stiles, celui-ci se centre sur l’arrivée de la jeune femme en Amérique, en se faisant passer pour la fille disparue d’une famille aisée…

S’il avait fait son petit effet lors de sa sortie, nul ne pouvait contester que Esther se suffisait largement à lui-même, son concept ne pouvant amener à une expansion de sa mythologie. Pourtant, plus d’une décennie après le long-métrage de Jaume Collet-Serra, des producteurs se sont dit que cela pouvait être une bonne idée de ressortir notre sadique ‘adulescente’ du placard où elle était enfermée, en jouant la carte du préquel – qui fait désormais office de passage obligé dans le genre ces dernières années. Petit bémol et pas des moindres, comment réintroduire le personnage à l’écran lorsqu’on son interprète a franchi le cap de la vingtaine ? Là est tout le problème. Comment s’est débrouillé William Brent Bell, à qui a été confiée la tâche de mettre en scène ce second volet, pour que l’illusion opère et que l’on se laisse convaincre par ce pari plus que douteux de la part d’Hollywood ? La réponse est malheureusement des plus simple, ce dernier s’est laissé embourbé dans ce projet sonnant faux, tentant de se reposer au maximum sur la suspension de crédulité pour embarquer le public avec lui.

Son prédécesseur ayant révélé toutes les facettes de son antagoniste, l’équipe créative n’avait que très peu de cartes dans sa main pour remporter la partie et par malchance celles-ci se révèlent des plus faibles. Les troubles de Leena – alias cette chère Esther – ainsi que son sens de la manipulation n’ayant plus de secrets pour le spectateur, il fallait redoubler d’efforts pour que la redite ne soit pas au programme, ce qui aurait été trop simple. Pour trouver une raison d’être à ce préquel, le scénariste David Coggeshall s’est attelé à un changement de positionnement quant au rôle de la ‘bad girl’, qui devient dès lors une protagoniste à part entière, choix tactique qui aurait pu avoir de l’intérêt si l’intrigue n’accumulait pas les facilités pour parvenir à ses fins. Malgré le plaisir manifeste d’Isabelle Fuhrman de reprendre ce rôle déterminant de sa carrière, à vrai seul point fort du long-métrage, il est regrettable de constater que l’actrice doit composer avec des fondations branlantes, finissant par s’effondrer à la longue.

Passée une introduction nous indiquant que l’on sera dans la démonstration et non plus dans l’insinuation, l’arrivée en Amérique de notre tueuse en herbe suit un déroulé dont on connaît déjà les ficelles, mais en se mettant désormais du point de vue de cette dernière – histoire de fournir un effet miroir au premier film. Prenant la place d’une fillette disparue, Esther, l’usurpatrice fait irruption dans le quotidien d’une riche famille telle une louve dans la bergerie, mettant en place une opération séduction pour dissiper les doutes et brosser ses proies dans le sens du poil – en particulier le père, marqué par la perte de la chair de sa chair. Alors qu’il y avait de quoi se nourrir de l’ambiguïté de cette duperie, ce qui faisait d’ailleurs la force du film original, David Coggeshall en prend le contrepied en opérant un twist à mi-parcours censé changer le paradigme préétabli, avec un résultat faisant basculer ce préquel vers sa perte, penchant vers le nanar malgré lui. S’engage alors une toute autre partie pour Leena, qui ne fait plus figure de menace mais d’anti-héroïne, perdant là son aura, ce qui est dommageable. D’autant plus lorsqu’en face d’elle se trouvent des opposants manquant cruellement de charisme – la faute à une caractérisation caricaturale -faisant retomber le soufflet du brasier s’apprêtant à crépiter, avec un acte final proche du ridicule.

En plus d’un scénario partant en roue libre en fin de parcours, Esther 2 : Les Origines pâtit de la mise en scène sommaire de William Brent Bell, qui se contente de suivre le mouvement sans chercher à élever les enjeux, ne serait-ce que dans l’établissement d’une atmosphère malsaine. Même concernant le point sensible de cet opus, à savoir la différence d’âge entre le personnage principal et son interprète, peu d’efforts sont produits pour faire passer la pilule, les diverses astuces proposées – doublures, plans serrés – renforçant ce côté factice propre à cette ‘suite’, qui ne peut compter que sur la performance d’Isabelle Fuhrman, qui tente de relever le niveau et (dans une moindre mesure) de Julia Stiles, qui croit un minimum en son rôle de mère bien sous tous rapport, à première vue. Les bribes de pistes intéressantes se retrouvent vite ensevelies sous un tas de mauvaises décisions créatives, ce qui porte préjudice à la qualité intrinsèque de ce film, qui n’a que peu d’utilité.

Malgré les efforts d’Isabelle Fuhrman pour faire passer la pilule, rien n’y fait, Esther 2 : Les Origines se révèle un préquel dénué âme, plombé par un scénario partant en vrille et la réalisation sans éclat de William Brent Bell.

© Metropolitan FilmExport

1 commentaire »

  1. Oula, comme je ne suis pas d’accord. Pour ma part, « Orphan: First Kill » est un bon thriller d’horreur disposant d’une histoire bien écrite, d’une intrigue originale et d’un développement surprenant. Le rythme s’accélère au fur et à mesure qu’on déroule l’histoire, le récit est fluide et la narration est linéaire. La photographie est agréable, la bande musicale est plaisante et le montage est posé. La distribution offre de bonnes prestations, toutefois dominées par la confrontation entre Julia Stiles et Isabelle Fuhrman qui livrent toutes deux des performances de grande qualité au service de personnages bien tordus. L’ensemble est réussi malgré l’ensemble des critiques négatives qu’on peut lire ici ou là, et vient parfaitement compléter le récit présenté dans le premier volet.
    ,-)

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