En 1986, Top Gun de Tony Scott déferlait dans les salles obscures, donnant à Tom Cruise ses galons de star avec son rôle Pete « Maverick » Mitchell. Trente-six ans plus tard, l’acteur revêt l’uniforme et le manteau de cuir de cette tête brûlée pour une suite intitulée Top Gun : Maverick, pilotée par Joseph Kosinski et comprenant au casting Miles Teller, Jennifer Connelly, Jon Hamm, Glen Powell, Lewis Pullman, Monica Barbaro, Danny Ramirez, Ed Harris ou encore Val Kilmer. En ligne de mire de ce second opus ? Le retour au bercail de Mitchell au sein de l’Académie lui ayant tout appris…

Les suites tardives, un bien vaste sujet. La crainte est toujours au rendez-vous lorsque l’idée de prolonger un long-métrage ou une franchise culte germe dans l’esprit des producteurs, le risque étant de se mettre le public à dos et de ternir l’intégrité de l’œuvre la précédant. Parmi les exemples récents, les sagas Die Hard et Terminator, qui ont souffert de choix créatifs douteux. Mais fort heureusement, il y a toujours des exceptions à la règle, comme nous le rappelait George Miller en 2015 avec son pétaradant Mad Max : Fury Road. Devenue une arlésienne avec le temps, l’idée de proposer une suite à Top Gun est finalement devenue réalité, faisant fi des obstacles rencontrés en plein vol – dont le décès de Tony Scott, l’artisan de ce succès planétaire qui aida à faire décoller la carrière de Tom Cruise. Ce second volet peut-il assurer au plus casse-cou des acteur américains actuels de marquer un autre tournant également dans sa filmographie ? Contre toute attente, la réponse se révèle positive, Top Gun : Maverick parvenant à mettre la pâté à son prédécesseur tout en montrant la marche à suivre pour proposer un divertissement digne de ce nom qui ne se moque pas de son auditoire.

Toujours plus haut, toujours plus fort, une devise que ce cher Tom met en pratique depuis maintenant une décennie, à travers Mission : Impossible, qui lui permet toutes les folies – que ce soit d’escalader le Burj Kalifa, de s’agripper à un Airbus A400M Atlas ou de passer son brevet de pilotage pour les besoins d’une course-poursuite entre hélicoptères – se dévouant ainsi corps et âme pour le septième art. L’expérience cinéma est cruciale pour le comédien/producteur, s’en voulant l’un des derniers pourfendeurs, un combat dont Top Gun : Maverick en est le parfait symbole, cherchant avant toute chose à impressionner le spectateur et lui en donner pour son argent. Pour s’y faire, rien de plus simple, jouer collectif devant et derrière la caméra pour que le produit fini respire la sincérité et sur ce point il n’y a pas de tromperie sur la marchandise. Si Joseph Kosinski prend la relève de Tony Scott, Jerry Bruckheimer revient au poste de producteur et le monsieur nous démontre qu’il n’a rien perdu de son savoir-faire en matière de grand spectacle hollywoodien, faisant flirter ce doux parfum de nostalgie des années 80/90 avec cette nouvelle épopée aérienne.

Si elle reprend en filigrane les ingrédients de son aîné, cette suite ne cherche aucunement à sortir de sa zone de confort en terme de narration, avec comme ligne directrice les petites guerres d’égos au sein de la fameuse United States Navy Fighter Weapons School, mais ce qui fait toute la différence est le traitement réservé à son héros ainsi qu’à ses traumas. Co-écrit par Ehren Kruger, Eric Warren Singer et Christopher McQuarrie – le wingman de Cruise depuis Jack Reacher – d’après une histoire esquissée par Peter Craig et Justin Marks, Top Gun : Maverick iconise notre aviateur de la Navy au point d’en faire une figure tragique proche d’Icare qui, se brûlant les ailes en volant trop près du soleil se voit clouer de force au sol, l’amenant alors à la croisée des chemins. De quoi entamer une réflexion sur le passage du temps et le poids de nos actions, avec un Pete Mitchell devant composer avec les fantômes du passé pour faire amende honorable. Revenu malgré lui dans l’école de haut-vol qui a changé sa vie, Maverick se voit endosser un rôle dont il ne raffole pas, celui d’instructeur. Le point de départ de ce qui s’annonçait comme un passage de relais, qui prend à revers cet attendu pour mieux forger la légende de son personnage principal.

Le but de la manœuvre opérée par notre trio de scénariste est de délivrer un message pour le moins méta sur l’état du blockbuster mais surtout sur sa vedette. Face à la nouvelle génération, Cruise/Maverick prouve qu’un vieux briscard de son acabit a encore des chose à leur apprendre, les prenant par la main pour montrer qu’ensemble ils peuvent soulever des montagnes – en l’occurrence ici les survoler – et changer la donne. Pour métaphoriser ce sous-texte, l’intrigue nous prépare à une assignation secrète sonnant cruellement comme une opération suicide, où les chances de survies sont minces. Impossible n’étant pas un mot du vocabulaire de Mitchell, ce dernier prépare ses recrues à dépasser leurs limites pour atteindre leur objectif avec ces méthodes pour le moins discutables. Entre sessions d’entraînements et conflits interne, le scénario joue une partition bien connue des fans, mais cela n’entache rien à l’efficacité du long-métrage car l’exécution est maitrisée du décollage à l’atterrissage.

Tom se démène pour que sa troupe d’élite rebattent les cartes du divertissement et cela se ressent à l’écran, principalement durant les nombreuses séquences aériennes, plus vraies que nature et pour cause, le casting a suivi une formation draconienne pour être à même de monter dans le cockpit. De quoi donner une réelle plus-value à ce grand spectacle voulu par l’équipe, sublimée par la mise en scène de Joseph Kosinski, qui a su relever le défi qui était à sa portée. Le point fort de Top Gun : Maverick réside dans ce sens de la précision propre à la réalisation du cinéaste, aidant à une excellente lisibilité des différents tableaux dépeints – sachant créer une atmosphère intimiste et crépusculaire quant il le faut tout en oubliant pas de foncer plein gaz lorsque l’action est au rendez-vous. L’immersion fonctionne à merveille lorsque l’on quitte la terme ferme, donnant l’impression d’être aux côtés des acteurs. De ce point de vue là, il est impératif de voir le film sur grand écran, les scènes d’entraînements et de combats aériens garantissant de véritables sensations – avec comme apothéose un dernier acte généreux en terme de morceaux de bravoure.

Avec Top Gun : Maverick, Joseph Kosinski met son sens de la mise en scène au profit d’un Tom Cruise en odeur de sainteté, nous montrant la voie à suivre pour proposer un blockbuster sincère et divertissant à souhait

© Paramount Pictures

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