Deux ans après Bienvenue à Marwen, Robert Zemeckis fait son retour derrière la caméra avec une relecture de Sacrées Sorcières, le roman éponyme de Roald Dahl, comprenant au casting Anne Hathaway, Octavia Spencer, Stanley Tucci, Jahzir Bruno, nous faisant suivre les mésaventures d’un orphelin et sa grand-mère suite à leur rencontre avec un clan sorcières aussi séduisantes que redoutables. Privé d’exploitation en salles suite à une certaine pandémie, le long-métrage vient de débarquer il y a peu en France, directement en vidéo.

Avec Sacrées Sorcières, Robert Zemeckis signe un retour en mode mineur, ce dernier essayant de masquer la faiblesse d’un scénario convenu à travers une mise en scène inspirée, pour une adaptation du roman de Roald Dahl se révélant fade et sans aspérité.

Pour ceux connaissant la précédente réinterprétation du roman sur grand écran, à savoir Les Sorcières de Nicolas Roeg, nul doute que la comparaison entre les deux œuvres sera au désavantage de celle de Zemeckis. Il y a trente-et-un an, ce long-métrage avait réussi à capter la dimension fantastique/horrifique du récit de l’auteur britannique, grâce à son atmosphère gothique, la performance diabolique d’Anjelica Huston ainsi que par le soin porté aux maquillages, effets spéciaux – conçus par la société de Jim Henson (Les Muppets, Dark Crystal), traumatisant toute une génération d’enfants. Un aspect aux abonnés absents de cette nouvelle version, où tout est édulcoré, pénalisant ainsi la dramaturgie de l’histoire.

Pourtant, à l’écriture, nous avons affaire à du beau monde puisque le script a été confectionné par le réalisateur, Kenya Barris et Guillermo Del Toro mais leur collaboration ne restera pas dans les annales alors qu’il y a du potentiel. Si l’ensemble se veut plus enfantin, les thématiques de la mort et du deuil sont tout de même présentes avec cette idée de la transformation – littérale et métaphorique – suite au décès d’un être aimé, ici les parents de notre personnage principal. Apprécions également le changement de cadre et de temporalité, l’intrigue se déroulant désormais dans l’Alabama des années 60, avec le spectre de la ségrégation en toile de fond mais cette idée, pertinente car pouvant faire un parallèle avec les problématiques actuelles survenant en Amérique, n’est que trop rarement abordée ce qui est dommage.

Passons désormais au vif du sujet, la fameuse rencontre avec ces cruelles diablesses que sont les sorcières imaginées par Roald Dahl, élément central du film. Reprenant fidèlement les péripéties du livre, nous suivons la fuite en avant de notre jeune orphelin et de sa grand-mère, pensant trouver refuge dans un prestigieux hôtel et se retrouvant confrontés à celles qu’ils voulaient fuir. Au sein de l’établissement se déroule en effet un colloque de la Société Royale Pour la Protection de l’Enfant Persécuté, un écran de fumée pour une réunion entre les différentes créatures du pays, chapeautée par la Grandissime sorcière. Au programme, un plan maléfique pour se débarrasser des enfants, qu’elles détestent tant, avec la présentation d’une arme ultime, une potion magique les transformant en souris.

Un sort que vont connaître notre jeune héros ainsi qu’un enfant séjournant dans l’hôtel, qui vont devoir se sortir des griffes de ces monstres aux dents acérés et tenter de contrecarrer leur sombre dessein, avec l’aide de son aïeule et d’un autre rongeur – créé spécialement pour le film, ce qui ne change rien à l’exécution des évènements. Si l’on suit cette escapade à quatre pattes dans les couloirs du bâtiment sans déplaisir, difficile pourtant d’y trouver un réel intérêt par rapport à ce qui nous avait offert il y a trois décennies au cinéma, surtout concernant le face-à-face avec la Grandissime sorcière. Si Octavia Spencer compose avec un personnage réconfortant, Anne Hathaway cabotine comme jamais dans le rôle de la méchante en titre, ce qui ne la rend pas plus effrayante. Ce qui ne joue pas non plus en sa faveur et n’améliore pas sa performance est le choix porté sur les effets spéciaux, les GCI utilisés pour la caractériser – ainsi que ses comparses malfaisantes – étant peu concluants.

Malgré ces défauts, Robert Zemeckis se démène pour proposer un divertissement au minimum acceptable et profite de l’espace qui lui est offert pour faire virevolter sa caméra et insuffler un semblant de rythme à l’ensemble. Sa mise en scène est le point fort de Sacrées Sorcières et confirme que même avec un matériau de base de faible qualité, notre cinéaste ne se laisse pas abattre et donne le change. Preuve en est, le long-métrage est truffé de trouvailles visuelles, à l’image de gouttes de pluies dessinant les attributs de nos sorcières tandis que nous est détaillé à l’oral leur apparence. Notons également que dès lors que la transformation en souris de certains des protagonistes se produit, Zemeckis s’amuse avec la profondeur de champ et les échelles de grandeur, pour des séquences bien pensées comme la fuite dans les conduits d’aération et autres couloirs de l’hôtel ou encore la scène où nos héros miniatures prennent du bon temps dans un grand-huit taillé sur mesure pour eux.

Malgré de bonnes intentions évidentes, difficile de se laisser embarquer dans cette nouvelle adaptation cinématographique de Sacrées Sorcières, Robert Zemeckis devant composer avec un scénario atténuant l’angle fantastique de l’œuvre de Roald Dahl et une Anne Hathaway en roue libre, qui empêchent le long-métrage de réellement décoller et de pleinement convaincre.

© Warner Bros.

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