[Critique] On The Rocks, un soupçon de doute
Trois ans après Les Proies, le remake du film éponyme de Don Siegel, Sofia Coppola est de retour derrière la caméra avec On The Rocks, une comédie dramatique réunissant Bill Murray, Rashida […]
Pour ceux qui se font des films en séries
Trois ans après Les Proies, le remake du film éponyme de Don Siegel, Sofia Coppola est de retour derrière la caméra avec On The Rocks, une comédie dramatique réunissant Bill Murray, Rashida […]
Trois ans après Les Proies, le remake du film éponyme de Don Siegel, Sofia Coppola est de retour derrière la caméra avec On The Rocks, une comédie dramatique réunissant Bill Murray, Rashida Jones et Marlon Wayans au casting. Sortie directement sur la plateforme Apple TV + en France, celle-ci nous fait suivre l’aventure d’une mère de famille et de son playboy de père à travers les rues de New York…
Conjuguant douceur et amertume, On The Rocks se veut une session thérapeutique sur le spleen et ses conséquences sur l’équilibre personnel et professionnel, orchestrée par une Sofia Coppola tentant de nous amener sur un nouveau terrain quant à son analyse de la solitude – qui parsème sa filmographie – pour une virée mélancolique plus ou moins enivrante.
Privilégiant cette fois la distraction à la contemplation, la scénariste/réalisatrice explore les relations humaines à travers une nouvelle approche, plus bavarde et plus rythmée qu’à l’accoutumée, ce qui permet de donner un peu de corps à une intrigue manquant de saveur à la base. En effet, difficile dans un premier temps d’entrer dans la vie de Laura et de compatir à son syndrome de la page blanche, un blocage prenant sa source dans le quotidien de l’écrivaine, tournant avant tout autour de l’éducation de ses filles. Avec un mari s’épanouissant professionnellement et s’absentant de plus en plus, cette dernière s’enferme dans une bulle et de ce sentiment d’enfermement va commencer à germer une petite graine, celle du doute.
De ce postulat fortement éculé, se dégage une certaine fadeur – qui se ressent lors du premier acte – mais fort heureusement le long-métrahexgagne en intérêt dès l’entrée en scène de son extravagant père, Felix, à qui elle a eu le malheur de demander un conseil sur le couple. Voulant déjouer les attentes quant au déroulé d’une telle storyline, Sofia Coppola fait de cette figure paternelle un élément perturbateur plus qu’un allié de poids, éclatant avec nonchalance la coquille dans laquelle se dissimulait sa fille et l’entraînant dans une filature qui, au lieu de la rassurer quant à la question de fidélité de son mari, va la déstabiliser et renforcer sa paranoïa quant à un probable adultère.
Porté par la sensibilité de Rashida Jones et la truculence de Bill Murray, qui forment un tandem père/fille attachant, On The Rocks bascule donc progressivement vers un buddy movie qui n’est pas dénué de charme. Comme Laura, nous nous laissons embarquer dans les stratagèmes et les élucubrations de son dandy de géniteur, qui permettent de mettre en exergue deux conceptions différentes du rapport homme/femme et du mariage. De cette aventure un brin fantasque, Sofia Coppola en tire une réflexion sur les relations amoureuses et filiales, se questionnant sur le fait de vivre dans l’ombre de son prochain, que ce soit son mari ou son père. Une introspection qui semble personnelle pour notre réalisatrice, ajoutant une dose d’authenticité se mariant plutôt bien dans cet élégant cocktail.
À travers une série de virées dans les rues de la Grosse Pomme et de discussions autour d’un bon verre dans des restaurants classieux, notre duo se confronte mais surtout se rapproche alors même que l’équilibre de la famille de Laura se fragilise au fur et à mesure de leur investigation, infusant à la fois un parfum de légèreté ainsi qu’une certaine ironie. Une fraîcheur que l’on aurait aimé sentir d’un bout à l’autre de ce jeu de piste, sauf que celle-ci s’amenuise dans son acte final qui conclut le métrage avec une forme de consensualité, alors que l’on espérait que toute cette histoire se termine sur une note plus émotionnelle, ce qui aurait pu donner de la matière à Marlon Wayans qui se voit relégué au second plan malgré sa place centrale dans l’intrigue.
Si ces défauts d’écriture ternissent quelque peu la qualité d’On The Rocks, la mise en scène feutrée de Sofia Coppola nous permet d’apprécier dans son ensemble cette petite parenthèse de délicatesse, sa caméra flânant avec grâce dans les rues d’un New York automnale et mettant en avant la solitude de ses personnages, instaurant une atmosphère propice à la mélancolie – renforcée par une photographie léchée signée Philippe Le Sourd et une bande son aérienne signée du groupe Phoenix, fidèle compagnon de la filmographie de la réalisatrice.
Même si elle ne signe pas son meilleur ouvrage avec On The Rocks, Sofia Coppola ne démerite pas et nous invite au cocooning et à la réflexion avec une comédie intimiste douce et amère sur les rapports humains ainsi que l’estime de soi, qui se laisse suivre grâce à la tendresse se dégageant du tandem Rashida Jones/Bill Murray, au diapason.