[Critique] L’Échange Des Princesses, enfance sacrifiée
L’Échange Des Princesses est un long-métrage basé sur le roman éponyme de Chantal Thomas paru en 2013, qui s’intéressait à un fait méconnu de l’Histoire. Son récit se centrait sur […]
Pour ceux qui se font des films en séries
L’Échange Des Princesses est un long-métrage basé sur le roman éponyme de Chantal Thomas paru en 2013, qui s’intéressait à un fait méconnu de l’Histoire. Son récit se centrait sur […]
L’Échange Des Princesses est un long-métrage basé sur le roman éponyme de Chantal Thomas paru en 2013, qui s’intéressait à un fait méconnu de l’Histoire. Son récit se centrait sur des informations qu’elle a retrouvé dans les mémoires du Duc de Saint-Simon, à savoir qu’en 1721 les hautes instances de France et d’Espagne avaient décidé, pour renforcer leurs liens après une longue période de guerre, d’échanger l’infante espagnole Anna Maria Victoria et Louise-Élisabeth de Montpensier, fille de Philippe d’Orléans du régent du royaume de France, pour que l’une puisse se marier avec le jeune Louis XV et l’autre à Luis, héritier du trône d’Espagne.
Il s’agit de la deuxième adaptation de l’un de ses œuvres sur grand écran après Les Adieux À La Reine en 2012 (réalisé par Benoît Jacquot). C’est Marc Dugain, écrivain (on lui doit entre autres La Chambre Des Officiers, qui a été transposé au cinéma en 2001) qui s’attaque à la mise en scène du film et au casting nous retrouvons Lambert, Olivier Gourmet, Catherine Mouchet ainsi que les jeunes Juliane Lepoureau, Anamaria Vartolomei, Kacey Mottet Klein et Igor Van Dessel.
Avec L’Échange Des Princesses, Marc Dugain nous convie à une reconstitution historique de toute beauté mais surtout à un drame dont la principale force réside dans l’implication des enfants dans l’intrigue, ils en sont les premiers rôles mais force est de constater qu’ils ne sont que des pions sur un échiquier politique.
L’enfance est sacrifiée au profit de la Cour et le droit des femmes se voit bafoué. Ces princesses ne sont que des accessoires, des cadeaux que l’on offre pour espérer une paix durable entre deux pays ainsi que des relations cordiales pouvant engendrer de futurs accords. Le scénario, fruit de la collaboration entre Marc Dugain et Chantal Thomas, ne dénature pas le roman et retranscrit bien ce cynisme ambiant. Cette situation peut sembler invraisemenblable mais elle est véridique et le ton du long-métrage oscille entre malaise et ironie. Entre le Régent Philippe D’Orléans, qui est l’investigateur de cette idée saugrenue et qui n’a pas une once d’hésitation à envoyer sa fille se marier sans consentement en passant par un Phillipe V qui n’est plus que l’ombre de lui-même, culpabilisant des pertes survenues durant la guerre avec la France, les figures du pouvoir sont pathétiques ainsi que la vie au sein de la Cour où le paraître est le seul mot d’ordre. Un monde froid et calculateur. Soit un environnement inadapté pour des enfants et pourtant ces pauvres vont être contre leur gré au pouvoir. Comme le prouve le jeune Louis XV, cette mise en avant dans un univers qui les dépasse engendre une perte de l’innocence. Devenant Roi à l’âge de quinze ans, il est obligé d’agir en adulte et gagne en froideur, comme en témoigne sa relation avec sa promise Anna Maria Victoria, basée sur l’indifférence la plus totale. Du côté espagnol, Don Luis agit quant à lui de manière diamétralement opposée avec Louise-Elisabeth de Montpensier, cherchant à consommer au plus vite sa vie maritale.
Face à leur nouvelle Cour, nos deux princesses vont à leur manière bousculer les protocoles. L’innocence d’Anna Maria, qui a seulement quatre ans, va dénoter avec le monde qui l’entoure et l’entourage de Louis XV se morfond qu’elle ne grandisse pas, qu’elle n’enfante pas. Louise-Elisabeth, qui est un peu plus vieille (douze ans) agace également Philippe V et sa famille car elle va se montrer insolente et espiègle, elle va bousculer les codes pour notre grand plaisir. Les deux personnages sont le rayon de soleil du film et les épreuves qu’elles subiront ne font que renforcer notre attachement pour elles.
Cette empathie est en grande partie due au jeu de Juliane Lepoureau et d’Anamaria Vartolomei qui sont les révélations de L’Échange Des Princesses. Cette dernière confirme qu’elle est un talent à suivre après avoir été révélée dans My Little Princess en 2011. Les garçons ne sont pas en reste et Igor Van Dessel (Louis XV) et Kacey Mottet Klein (Don Luis) sont de bons contrepoids à nos princesses avec un Roi froid et insensible d’un côté et un héritier qui se révèle sensible. À leurs côtés les acteurs confirmés comme Lambert Wilson, Olivier Gourmet, Catherine Mouchet ou encore Maya Sansa sont justes. Une belle distribution.
Enfin la réalisation de Marc Dugain permet une immersion totale dans le XVIIIème, bien aidé par Gilles Porte, le directeur de la photographie et Fabio Perrone pour les costumes. Sa direction d’acteur et ses plans serrés servent bien le propos et on se ressent l’effet d’enfermement de nos princesses, prisonnières d’un monde qui ne devait pas être le leur.
L’Échange Des Princesses est un drame historique rondement mené grâce à son travail d’écriture précis et son idée de se centrer sur le sacrifice de l’enfance pour servir la cause politique. Enfin le jeu de nos jeunes acteurs aide à faire du long-métrage un spectacle plaisant à regarder.
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