Comme en chimie, le mashup est l’art de la transformation, les images et les sons trouvant un sens nouveau, une caisse de résonnance différente au gré des inspirations de chacun. Gagnant en popularité avec l’avènement d’internet et des réseaux sociaux, cette forme de création à son public. Un engouement ayant notamment mené à l’instauration d’un festival à part entière, le Mashup Film Festival, initié en 2011 par le Forum des Images à Paris. A sa tête, le réalisateur Julien Lahmi qui, après quelques courts-métrages, s’essaye à l’exercice de la série avec Tralala Bang Bang, un projet pour le moins atypique où le cinéma se parle à lui-même.

Disponible depuis le 15 avril sur la plateforme CoMét, Tralala Bang Bang se veut une balade existentielle à travers le septième art, s’amusant des codes pour mener à bien une analyse psychédélique sur le libre-arbitre, la liberté. Ici, pas de second degré ni de pastiche mais le développement d’une véritable histoire sur le sens de la création. Une thématique des plus larges, qui se nourrit de l’incommensurable richesse du cinéma pour appuyer son propos, donnant ainsi lieu à un objet filmique des plus curieux, cherchant à sortir des sentiers battus non sans une certaine poésie.

Coécrite avec Marie-Philippe Jocheray, cette série mashup en vingt-et-un épisodes (d’une dizaine de minutes chacun) permet à Julien Lahmi de prendre le pas du mouvement dadaïste, en réalisant une tragicomédie musicale emprunte de ‘fantasy’, où l’absurde offre un écho particulier à un questionnement sociétal, l’irrationnel exarcerbant les interrogations quant à un réel bien présent. Dans une galaxie lointaine, très lointaine un certain Dark Vador campe son rôle de despote avec un professionnalisme déconcertant, rivalisant de machiavélisme en s’accaparant de l’essence même de la couleur et jouant les marionnettistes en créant deux êtres dotés de capacités hors-normes. Des pantins polymorphes, prénommées Victorine et Chrysaldo, qui vont arracher leurs ficelles et échapper à leur maître, s’émancipant de ce dernier et du côté obscur de la Force. Le point de départ d’un voyage introspectif où le tandem principal va découvrir les multiples facettes d’un univers de tous les possibles et mettre toutes les chances de leur côté pour avancer main dans la main vers l’inconnu.

Un périple initiatique synonyme d’aventure sybilline au coeur de la pellicule, Julien Lahmi détricotant les images et les bandes originales pour convier le spectateur à un spectacle pour le moins déroutant. Le réalisateur se met aux manettes d’un ofni à l’atmosphère lourde mais enivrante, qui suscite la curiosité d’épisode en épisode, la fuite en avant de Victorine et Chrysaldo prenant une saveur particulière alors que les visages de figures du milieu telles que Charlie Chaplin, Buster Keaton, Eva Green, Dustin Hoffman, Joaquin Phoenix se succèdent et s’interposent à l’écran, le tout au douces sonorités de bandes originales emblématiques et de chansons cultes, conviant l’esprit de Johnny Hallyday ou encore d’Edith Piaf entre deux morceaux composés par John Williams et Steve Jablonsky.

Ce qui attire surtout l’attention avec Tralala Bang Bang, c’est le sens du montage et du détail au niveau de la mise en scène, qui se montre des plus inventives, en cumulant avec une certaine précision collages, rotoscopies et balances des couleurs. Un alliage solide, aidant à crédibiliser la démarche de Julien Lahmi, qui prend un malin plaisir à utiliser le langage cinématographique pour le décortiquer et entamer une discussion sur le cinéma.

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