Succès surprise de l’automne dernier, avec plus de 1 628 125 spectateurs, Les Bodin’s en Thaïlande de Frédéric Forestier est venu confirmer la popularité du tandem comique formé par Vincent Dubois et Jean-Christian Fraiscinet, dont la renommée a dépasser les frontières de la scène pour s’étendre dans le milieu de septième art – leur permettant notamment de surpasser OSS 117 : Alerte Rouge En Afrique Noire ou encore Aline parmi les grosses productions hexagonales de 2021. Ce qui a de quoi paraître paradoxal lorsque l’on pense que Les Bodin’s ont derrière eux vingt-huit ans de carrière et que leur long-métrage marque déjà leur troisième rodéo dans le milieu du septième art, renforçant l’exploit perpétré. A l’occasion de sa sortie ce 16 mars en DVD, DVD collector (avec un disque bonus contenant une interview d’une heure des interprètes et Maria et Christian Bodin) et Blu-ray, intéressons-nous à cette escapade thaïlandaise de cet inénarrable duo mère/fils, inséparables malgré leur désaccord majeurs.

Habitué à être accompagné derrière la caméra, que ce soit aux côtés d’Alain Berbérian – pour le Boulet – ou encore Thomas Langmann – pour les besoins d’Astérix Aux Jeux Olympiques et Stars 80 – Frédéric Forestier trace de temps à autres sa route en solo. Ainsi, après Les Parrains, Mon Poussin et quelques téléfilms pour TF1, le réalisateur s’est vu confié la mise en scène de la nouvelle aventure cinématographique des Bodin’s, synonyme de dépaysement pour nos paysans – habitués à ne pas bouger de leur patelin Pouziou-les-Trois-Galoches. En effet, que ce soit dans leur nombreux spectacles ainsi qu’au cours de leur deux précédents longs-métrages, Maria et son rejeton sont restés cloîtrés dans un périmètre pour le moins restreint – obligations propre à leur travail à la ferme oblige. Ici, avec Les Bodin’s en Thaïlande, l’idée de l’équipe créative est d’élargir l’horizon de nos personnages, direction la pays du sourire. Une démarche qui semble avoir eu un impact sur leur public si l’on se fie aux chiffres du box office, dépassant à n’en pas douter les attentes de tout le monde. Pour rappel, Mariage Chez Les Bodin’s fût découvert en salles par 75 986 spectateurs en 2008 tandis Amélie Au Pays Des Bodin’s avait engrangé 102 065 entrées lors de sa sortie deux ans plus tard. Comme le vin, le duo formé Vincent Dubois et Jean-Christian Fraiscinet se bonifie t-il avec le temps ?

Si leurs précédentes incursions sur grand écran – chapeautées par Eric Le Roch – prenaient la forme du mockumentaire, cette dernière excursion en date reflète de la nouvelle stature de nos Bodin’s qui, grâce à leur collaboration avec Claude Cyndecki (Cheyenne Productions) ont su gagner en exposition et en notoriété. Preuve en est, les moyens mis à disposition pour faire voyager Maria, Christian et le public, donnant lieu à un objet davantage cinématographique. Mais à aligner les billets sur la table, n’y a t-il pas de risque de perdre cette simplicité propre à la formation comique, dont l’humour repose sur des valeurs franchouillardes pouvant parler au plus grand nombre ? Pour répondre à cette interrogation, le visionnage des Bodin’s en Thaïlande s’imposait tout naturellement. Faisant suite aux deux précédents opus, le long-métrage joue ainsi la carte du changement de cadre pour amener à un changement de paradigme le temps d’un instant, afin d’amener ses personnages vers l’inconnu – et la connerie. Car comme l’exige généralement la formule, tels des poissons hors de l’eau ces touristes du dimanche font l’expérience d’un monde qu’ils ne connaissent pas au gré de leurs gaffes et autres péripéties rocambolesques. Voir les Bodin en mode ‘lost in translation’, il est vrai que cela pouvait avoir du potentiel quant on connaît nos trublions entre une matriarche qui a de la répartie et un fils gauche et candide.

Abandonnant durant une heure trente leur ferme, Maria et Christian partent en quête de dépaysement et de sens, ce dernier devant changer d’air pour espérer sortir d’une crise existentielle de grande ampleur. Pour s’y faire, le tandem délaisse Pouziou-les-Trois-Galoches pour les décors de carte postale de la Thaïlande, un lieu de rêve devant redonner goût à la vie à ce grand dadet en proie à la dépression. Ce qui ne sera pas de tout repos, les Bodin n’étant pas comme des coqs en pattes dans cet univers paradisiaque dont il ne maitrise pas les codes, découvrant, souvent à leurs dépends, les us et coutumes de cette contrée. De quoi nourrir une première partie de l’intrigue où les attendus du genre se se succèdent de manière classique, pour un choc des classes et des cultures dont on devinait aisément les ficelles. Fort heureusement, Les Bodin’s En Thaïlande ne se contente pas d’amuser la galerie uniquement avec des farces potaches sur les difficultés d’adaptation de ses héros, Vincent Dubois, Jean-Christian Fraiscinet et Frédéric Forestier – qui officient ensemble à l’écriture – décidant s’emprunter une autre direction en cours de route.

Cette escapade au pays du sourire se transforme de ce fait en récit d’aventure, où une rencontre fortuite dans un bar pour le moins obscur entraîne mère et fils prendre sous leur aile Malee, une jeune femme piégée par un employeur peu scrupuleux. Trouvant son rythme, entre humour et action, le film met à profit les valeurs humanistes des Bodin, ce côté populaire – dans le sens premier du terme – étant utilisé à bon escient dans cette histoire de retour au bercail qui se met en place, le trio nouvellement formé s’aventurant dans la campagne thaïlandaise pour une mission altruiste. Ce qui fait le charme des Bodin’s se retrouve dans cette seconde partie, les facéties ainsi que les répliques mordantes de Christian et Maria venant conforter les amateurs de nos humoristes tandis que les séquences ‘musclées’ entre courses poursuites et combats (oui, oui) apportent une dimension de spectacle grand public qui n’est pas désagréable pour être honnête. Fidèles à eux-mêmes, Vincent Dubois et Jean-Christian Fraiscinet s’en donnent à cœur joie pour tenter de déclencher les rires et donner le change à leurs fans fidèles – le tandem étant l’atout du film grâce à leur bonhommie. On peut alors aisément comprendre pourquoi près de deux millions de spectateurs se soient déplacés en salles pour découvrir cette cure de dépaysement.

© SND

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