Pour son premier long-métrage, intitulé Le Dernier Voyage, le réalisateur Romain Quirot étend l’univers développé dans son troisième court-métrage, Le Dernier Voyage De L’Énigmatique Paul W.R, mis en scène en 2015 et […]
Pour son premier long-métrage, intitulé Le Dernier Voyage, le réalisateur Romain Quirot étend l’univers développé dans son troisième court-métrage, Le Dernier Voyage De L’Énigmatique Paul W.R, mis en scène en 2015 et auréolé de nombreux prix. Comprenant au casting, Hugo Becker, Lya Oussadit-Lessert, Paul Hamy, Bruno Lochet, Jean Reno et Philippe Katherine, celui-ci nous entraîne dans un monde post-apocalyptique où le dernier espoir de l’humanité réside en la personne d’un astronaute, peu enclin à accepter son destin…
Pour sa première incursion sur grand écran, Romain Quirot nous embarque à bord d’une fable fantastique respirant l’amour de la science-fiction, Le Dernier Voyage se révélant être une odyssée intimiste et poétique sur fond de fin du monde, dont l’application – soignée – procure un léger vent de fraîcheur dans le paysage hexagonal.
Les propositions de S-F restent rares sur notre territoire et sont généralement peu mises en avant – à quelques exceptions près bien entendu – alors que certaines d’entre elles méritaient d’être découverte par un public plus large. Alors, lorsqu’un film indépendant comme celui-ci débarque inopinément dans les salles obscures, se faisant connaître à travers une campagne promotionnelle éclair, la curiosité était au rendez-vous. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que Le Dernier Voyage offre un spectacle divertissant et référencé plaisant à regarder, devant beaucoup à l’enthousiasme de son réalisateur, rendant un hommage sincère au genre.
Direction un futur plus ou moins proche où notre planète n’est plus qu’une terre brûlée et dévastée, une conséquence désastreuse de l’exploitation intensive de la lune rouge par les humains, puisant à outrance sa ressource énergétique. Un acte qui a des conséquences, avec un satellite bien décidé à mener sa vengeance ‘karmique’, changeant de trajectoire pour se diriger vers ceux qui l’ont malmené. A l’aube d’une inévitable apocalypse, le sort de l’humanité repose dans les mains d’une seule personne à savoir Paul W.R., un sauveur providentiel aux abonnés absents, préférant prendre la fuite que d’assumer un tel rôle. Un point de départ en forme de fable écologique, qui nous entraîne dans une fuite en avant crépusculaire qui ne manque pas de charme.
Si son scénario n’est pas exempt de défauts, se révélant expéditif sur des points centraux de sa mythologie – avec de nombreuses zones de flou sur les effets de la Lune ainsi que sur les pouvoirs de certains personnages – il n’empêche que cette balade entre les ruines d’un monde aujourd’hui disparu vaut le coup d’œil pour son ambiance poussiéreuse, proche du néo-western, qui se marie bien avec le parcours de notre anti-héros. Incarné avec justesse par Hugo Becker, Paul est un être désabusé errant dans un univers désolé, se raccrochant à un passé trouble pour ne pas affronter la pression d’un obscur présent. Teintée de fatalisme, l’exode de notre astronaute sert à met en lumière les erreurs de l’Homme, sacrifiant son avenir sur l’autel du profit, un message simple mais efficace.
Se refusant à suivre un chemin tout tracé, notre fugitif s’engage sur un terrain glissant, devenant l’ennemi numéro un aux yeux des autorités, permettant une série de péripéties destinés à insuffler un semblant de rythme dans un récit introspectif, où se conjuguent blessures familiales, acceptation de soi et l’espoir de jours meilleurs. Des thématiques pouvant parler au plus grand monde et enrichissant Le Dernier Voyage d’une dimension émotionnelle bienvenue, rattrapant les quelques maladresses du scénario. Pour se faire, Romain Quirot procède à une extension de la lignée de Paul W.R. – un point non présent dans le court originel – avec l’ajout d’un père et d’un frère, interprétés par Jean Reno et Paul Hamy, qui s’en sortent avec les honneurs niveau jeu.
Mais c’est surtout la création du personnage d’Elma qui fait prendre corps à cette valeur sentimentale, l’adolescente au caractère bien trempé s’invitant naturellement dans la fuite de notre protagoniste pour un résultat satisfaisant, d’une part grâce à la prestation enjouée de Lya Oussadit-Lessert, dont c’est le premier rôle, qui forme un tandem complémentaire avec Hugo Becker mais également par le symbole représenté par la jeune femme, porte-parole d’une jeunesse désœuvrée par les actions de ses aînés et bien destinée à avancer et à se battre pour l’espoir de jours meilleurs. De quoi offrir une lueur dans un sombre tableau.
Terminons avec la réalisation de Romain Quirot, qui est sans nul doute le véritable point fort de ce Dernier Voyage, convoquant les codes de la science-fiction des années 80/90 pour nous immerger dans ce monde post-apocalyptique. Une mission réussie haut la main, son long-métrage parvenant à faire travailler notre sens de l’imaginaire avec peu de moyens (son budget est estimé à 2M d’euros). Décors désertiques et délabrés, voitures volantes ou encore lune rouge incandescente et imposante, visuellement nous y croyons et apprécions le spectacle proposé à l’écran.
S’il ne révolutionnera pas le genre, Le Dernier Voyage n’en reste pas moins une proposition rafraîchissante dans le paysage français, respirant l’amour de la science-fiction dans chaque pore de sa pellicule. N’échappant pas à quelques facilités au niveau de son scénario, ce premier essai de Romain Quirot est prometteur, sa démarche – sincère – et son sens de la mise en scène nous transportant dans une odyssée post-apocalyptique plaisante à suivre. Voilà un réalisateur qu’il faudra suivre attentivement.
Une mission réussie haut la main