Deux ans après vaincu Ghidorah, devenant ainsi le Roi des Monstres, Godzilla est de retour pour une troisième aventure cinématographique sous la houlette de Legendary Pictures et Warner Bros. Prenant la suite de Michael Dougherty, Adam Wingard (Krampus) s’attèle à la mise en scène de Godzilla vs Kong, qui comprend au casting Rebecca Hall, Alexander Skarsgård, Millie Bobby Brown, Demián Bichir, Eiza González, Brian Tyree Henry, Julian Denninson, Shon Oguri ou encore Kyle Chandler et -comme son titre l’indique – voit notre Titan affronter l’un de ses plus redoutables adversaires : King Kong.

Privé d’exploitation en France, la faute à une fermeture des cinémas qui s’éternise, c’est à la maison que nous pouvons découvrir Godzilla vs Kong, le long-métrage d’Adam Windard débarquant de ce fait directement en achat digital. Un contexte qui ne joue pas en sa faveur, la notion de grand spectacle s’amenuisant hors des salles obscures et cet aspect est fondamental pour un tel blockbuster, dont l’intérêt principal réside dans sa propension à nous en mettre plein la rétine sur le plus grand des écrans. Un point d’autant plus vital lorsque le scénario n’est pas à la hauteur, ce qui est malheureusement le cas de figure ici. Ainsi, alors que nous nous attendions à un combat féroce entre nos deux Kaijū, qui se retrouvent cinquante huit ans après le King Kong Contre Godzilla de la Toho, force est de constater que ce nouveau face à face peine à tenir ses promesses.

Censé être le point culminant du MonsterVerse, développé depuis quatre films par Legendary Pictures/Warner Bros., ce choc des Titans se révèle moins percutant que prévue, se heurtant à un problème de taille à savoir une intrigue foutraque qui impacte fortement l’efficacité de l’ensemble. Avec deux opus pour Godzilla contre un seul pour Kong, nous démarrons dans un premier temps ce crossover avec un certain déséquilibre, une problématique qu’Adam Wingard essaye de combler en donnant le beau rôle à notre souverain de Skull Island, se retrouvant au cœur des événements, un parti pris permettant de positionner notre roi des monstres en antagoniste et d’instaurer le climat conflictuel voulu pour un affrontement bestial. Ainsi, s’il était auparavant perçu comme une figure déifique n’apparaissant que pour restaurer un ordre établi et sauver l’humanité (en détruisant tout sur son passage certes), Godzilla est désormais considéré comme un être dangereux, achevant sur son passage les MUTO qui sont désormais sous sa domination.

Un changement de paradigme qui aurait pu avoir un certain potentiel s’il n’avait été exploité par dessus la jambe par notre équipe de scénaristes composée de Michael Dougherty, Eric Pearson, Max Borenstein, Zach Shields et Terry Rossio, qui préfère se consacrer à des quêtes connexes où l’humain à la part belle sauf que – tout comme dans Kong : Skull Island ou Godzilla II : Roi Des Monstres – nous sommes face à des enjeux et des personnages peu crédibles qui viennent nuire à la lutte de pouvoirs qui aurait dû nous accaparer ici. Bien entendu, lorsque l’on regarde un blockbuster de cet acabit, nous savons très bien que le but est de poser son cerveau durant près de deux heures puis de se laisser porter par l’ébauche de chaos et de destruction se déroulant à l’écran. C’est un fait. Mais cette pause récréative et régressive peut s’accompagner d’un minimum d’efforts au niveau de l’écriture pour offrir plus qu’une avalanche de ‘money shots’ et de séquences spectaculaires, ce qui n’est pas le cas dans Godzilla vs Kong malheureusement. Si on ne boude pas notre plaisir devant les différents rounds de ce match de boxe entre nos Titans, qui suit là aussi une trajectoire toute tracée avec le fameux cahier des charges où l’opposition mène à l’alliance face à un ennemi commun – un classique – il est regrettable que tout ce qui tourne autour de ce Fight Club pour prédateurs géants soit si sommaire, si brouillon. Il aurait été clairement préférable de se passer le plus possible de la présence humaine, qui parasite clairement le long-métrage.

Preuve en est, si l’on effleure les origines du MonsterVerse en nous introduisant à la théorie de la Terre creuse avec le ‘Hollow Earth’, lieu d’où seraient originaires toutes les créatures aperçues depuis le Godzilla de Gareth Edwards – dont nos deux Titans – levant le voile sur un possible conflit millénaire, ce point crucial ne reste que superflu car englobé dans une sous-intrigue centrée sur Monarch, l’organisation qui sert de fil rouge entre les différents volets de la saga, où s’invite une multinationale peu scrupuleuse et avide de pouvoir, servant à démontrer – avec la finesse d’un MechaGodzilla – que l’Homme est une force aussi destructrice que les Kaijū. Ajoutons à cela l’investigation du personnage de Madison Russell (Millie Bobby Brown), transfuge de Godzilla II : Roi Des Monstres avec son père (Kyle Chandler, carrément relégué au troisième plan) qui, accompagnée d’un ami et d’un lanceur d’alerte, se voit connectée – avec des facilités scénaristiques sidérantes – aux événements du film avec à la clé des deus ex machina peu inspirés, destinés à prouver que nos héros de chair et d’os ne sont pas si inutiles que cela. Un seul protagoniste s’en sort avec les honneurs, celui de Jia, incarnée par la jeune Kaylee Hottle, l’actrice se montrant plus convaincante que le reste de la distribution en réussissant à nous faire croire en son lien fusionnel avec Kong rien qu’avec un regard et l’utilisation du langage des signes, pour un jeu tout en simplicité, insufflant une once d’émotion bienvenue.

Comme vous l’avez compris, l’intérêt de Godzilla vs Kong réside uniquement dans le conflit opposant nos deux monstres sacrés du septième art et celui-ci se ponctue de morceaux de bravoures, où coups de pattes et cris rugissants viennent nous sortir de notre torpeur. De ce point de vue là, les amateurs de ‘destruction porn’ devraient être satisfaits, Adam Wingard se montrant généreux avec plusieurs séquences de chamailleries entre nos adversaires en ligne de mire, ce qui est un bon point. Si l’on peut regretter une absence de soin quant au gigantisme propre à nos grosses bêtes, ce qui leur fait perdre en charisme (seuls Gareth Edwards et Jordan Vogt-Roberts avait rendre imposants nos héros de poils et d’écailles), le réalisateur parvient tout de même à offrir des scènes d’actions lisibles et d’une durée convenable, entre un match-aller dans l’eau, un match-retour sur la terre ferme à la lueur des bâtiments éclairés puis une bataille royale en plein jour. Quand Godzilla et Kong se rentrent dedans, le divertissement est de mise.

Annoncé comme l’apothéose du MonsterVerse, Godzilla vs Kong d’Adam Wingard n’est pas le choc des Titans attendu, se révélant n’être qu’un simple match de gala, donnant un minimum le change aux spectateurs sans vouloir se donner à fond. Pénalisé par un scénario bordélique, qui se consacre à des personnages inutiles, ce face à face monstrueux possède quelques moments réjouissants – dès que nos Kaijū entrent en scène – mais au final nous n’en avons pas pour notre argent. Espérons un prochain round plus inspiré, pour un vrai combat épique.

© Legendary/Warner Bros. Entertainment Inc

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