Après avoir fait forte impression aux côtés de ses camarades super-héroïques dans Batman v Superman : L’Aube De La Justice et Justice League puis avoir été à l’honneur d’un film-solo couronné de succès (821,8M$ de recettes mondiales), Diana Prince ressort son glaive et son lasso pour affronter de nouveaux ennemis. Ainsi, quatre ans après Wonder Woman, Patty Jenkins et Gal Gadot se retrouvent derrière et devant la caméra pour un second volet, intitulé Wonder Woman 1984, qui réunit au casting Chris Pine, Kristen Wiig, Pedro Pascal et nous plonge – comme son titre l’indique – dans les années 1980, période où notre Amazone va devoir affronter deux nouveaux ennemis, Cheetah et Maxwell Lord…

Initialement prévu pour le grand écran, c’est finalement en vidéo que nous pouvons découvrir Wonder Woman 1984, qui n’a pas pu être exploité comme il se devait en salles suite à la pandémie de COVID-19, qui a entraîné une fermeture des cinémas il y a maintenant près de six mois. Si le contexte sanitaire a pénalisé sa carrière, notons que le film de Patty Jenkins doit également faire face à d’autres problèmes avec une suite qui, malgré de bonnes intentions, s’embourbe dans une histoire capillotractée qui dessert son propos et fait perdre de sa superbe à cette chère Diana Prince.

Alors que son origin-story avait su concilier public et critique, force est de constater que ce deuxième opus ne pourra que diviser tant il est clivant de par ses choix artistiques, aussi bien au niveau de son scénario et de sa réalisation. On peut comprendre la décision de Patty Jenkins de changer d’ambiance pour cette nouvelle aventure et lon saisit son envie de se rapprocher de l’atmosphère candide et optimiste des productions DC des années 70/80 à l’image de la série Wonder Woman (avec un jolie clin d’œil à la clé soit-dit en passant) et du Superman de Richard Donner, permettant ainsi de mettre l’humain au cœur des enjeux – ce qui confère indéniablement un certain charme au long-métrage. Malgré cette volonté de composer avec des thématiques plus intimistes, force est de constater qu’au final le résultat et résolument kitsch mais loin d’être convaincant, la faute à une intrigue nanardesque venant parasiter les quelques bonnes idées de l’équipe créative.

Si l’on passera sur l’incohérence posée par l’ancrage temporel de ce volet, qui met quelque peu à mal le fait que notre héroïne était censée s’être coupée du monde – un fait acté dans les films de Zack Snyder – ce qui pose le plus problème dans Wonder Woman 1984 est la faiblesse du script co-écrit par Jenkins, Geoff Johns et Dave Callaham. En effet, passée la scène d’introduction se déroulant sur Themyscira, difficile de se laisser embarquer dans la quête qui nous accapare ici. Jusqu’où iriez-vous pour pouvoir réaliser notre vœu le plus cher ? Telle est la question principale posée par notre trio de scénaristes, qui met nos personnages face à leurs ambitions, leurs souhaits et les conséquences que ceux-ci peuvent avoir s’ils deviennent réalités. Une storyline qui avait du potentiel et qui aurait pu s’avérer divertissante si elle n’avait pas été totalement diluée dans une série de détours et d’imbroglios nous éloignant de l’essentiel, nuisant de ce fait à son efficacité.

Par le biais d’un MacGuffin peu recherché, la fameuse Dreamstone – pierre pouvant exaucer les désirs – nous sont exposés les différents effets d’un tel pouvoir, qui attire forcément les convoitises, peu importe ses intérêts. Que ce soit Diana mais également nos nouveau venus à savoir Maxwell Lord, un pathétique entrepreneur à la recherche de reconnaissance et Barbara Minerva, géologue/cryptozoologiste manquant cruellement de confiance en soi, chacun de nos protagonistes se laisse pervertir par ses envies. L’égoïsme peut toucher tout le monde, du côté du bien ou du mal, ce qui renforce ce côté terre à terre établi. Démystifier Diana, en faisant passer son rôle de demi-Déesse au second plan et ce afin mieux exploiter ses failles est sans conteste le point le plus intéressant du long-métrage, son parcours de résilience aidant à consolider son statut d’héroïne en fin de course.

Pour en arriver là, il faut que l’on suive un itinéraire jonché d’embûches et ponctué de nombreuses maladresses scénaristiques à commencer par le retour de Steve Trevor, sujet à une certaine controverse. Malgré l’alchimie indéniable entre Gal Gadot et Chris Pine, qui aide à faire passer la pilule, la ‘réapparition’ de notre pilote dans le cœur de son Amazone perturbe premièrement par le processus employé – une réincarnation peu avisée – et deuxièmement par la dépréciation de la dimension féministe propre à Wonder Woman. Concernant les autres points de discorde, notons que malgré la durée excessive du film, les autres thématiques abordées ne font qu’être survolées ce qui est un comble. En étirant artificiellement son récit, cette suite prend trop de détours et se perd dans des sous-intrigues peu avenantes, principalement lorsque cela concerne Maxwell Lord et Barbara Minerva.

Alors qu’il y avait de la matière pour traiter comme il se doit le capitalisme – les années 80 symbolisant parfaitement ce régime économique avec l’essor des golden boys – de même que le harcèlement vis à vis de la gente féminine, Patty Jenkins, Geoff Johns et Dave Callaham préfèrent se contentent s’égrainer les stéréotypes et ne proposent aucune réelle réflexion sur ces sujets ni même sur les raisons qui poussent notre tandem à s’enfoncer dans le côté obscur de la force. Avec cette absence de nuance, Pedro Pascal et Kristen Wiig ne savent pas vraiment comment appréhender leur alter-ego et cela se ressent à l’écran. S’ils savent leur insuffler une once d’humanité, au final entre le magnat du pétrole voulant le calif à la place du calif et la femme réservée devenant – littéralement – une prédatrice (en l’occurrence Cheetah) ceux-ci livrent des prestations grandiloquentes à la limite du sur-jeu, ce qui ets dommage.

Wonder Woman 1984 pâtit aussi d’une mise en scène peu inspirée, Patty Jenkins ne trouvant qu’à de très rares occasions des idées pouvant élever le niveau et offrir un contre-poids à un scénario alambiqué. Notons ainsi que outre la séquence d’ouverture, un autre passage ressort du long-métrage, celui où Diana doit renoncer à son souhait, un sacrifice dont on ressent l’impact émotionnel et qui donne lieu à une scène cruciale, où l’on a enfin l’impression que le fond et la forme ont trouvé un terrain d’entente, avec comme ligne de mire la (re)naissance d’une héroïne, s’envolant vers son destin. Un moment de grâce qui nous prouve que l’envie était là mais que l’exécution était plus qu’hasardeuse derrière la caméra. Preuve en est, la majorité des effets spéciaux ne tiennent pas la route, les fonds verts se voyant à des kilomètres – ce qui commence à devenir une mauvaise habitude dans les productions DC Films – et les CGI étant dignes d’une cinématique de jeu-vidéo, particulièrement dans le dernier acte avec le design calamiteux de Cheetah. Une pauvreté visuelle qui pourrait être une conséquence de la pandémie de coronavirus, qui a forcément due compliquer la post-production.

Si parfois vouloir changer une formule gagnante peut s’avérer salutaire, dans le cas de Wonder Woman 1984, cela lui porte préjudice. Malgré de bonnes idées, Patty Jenkins se fourvoie dans une suite ne sachant pas sur quel pied danser, enjeux et problématiques humanistes se voyant associés à des intrigues confuses et nanardesques, annihilant quasiment toute tentative de dramatisation. Si Gal Gadot se démène pour maintenir le film à flots, cette dernière n’est pas aidée par un script brouillon et une réalisation des plus plates, ne rendant pas justice à son personnage. Après ce coup de glaive dans l’eau, il est temps pour Diana Prince d’oublier le passé et de se projeter vers le présent pour ses prochaines aventures. Wonder Woman a du potentiel, il serait dommage de tout gâcher.

© Warner Bros.

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