[Critique] Obi-Wan Kenobi, espoirs déchus
Quelques mois après Le Livre De Boba Fett, les fans de Star Wars ont récemment pu de nouveau voyager dans une galaxie lointaine, très lointaine- via Disney + – afin de renouer […]
Pour ceux qui se font des films en séries
Quelques mois après Le Livre De Boba Fett, les fans de Star Wars ont récemment pu de nouveau voyager dans une galaxie lointaine, très lointaine- via Disney + – afin de renouer […]
Quelques mois après Le Livre De Boba Fett, les fans de Star Wars ont récemment pu de nouveau voyager dans une galaxie lointaine, très lointaine- via Disney + – afin de renouer le contact avec l’un des personnages phares de la saga. Seize ans après La Revanche Des Siths, Ewan McGregor a ressorti son sabre laser du placard pour les besoins d’Obi-Wan Kenobi, série pilotée par Deborah Chow, levant le voile sur ce qu’il est advenu de l’ancien chevalier Jedi suite à l’avènement de l’Empereur Palpatine…
Des perturbations dans la Force, nous ressentons. Échaudé par le relatif échec de Solo, la présidente de Lucasfilm, Kathleen Kennedy, a décidé de changer son blaster d’épaule concernant l’exploitation de la marque Star Wars sur grand écran, laissant les choses se tasser après la postlogie pour mieux repartir du bon pied, notamment concernant les films dérivés de la timeline principale. En attendant de voir ce que donneront les multiples projets en développements au cinéma, la société en charge des créations de George Lucas a trouvé matière à s’épanouir sur la petite lucarne avec The Mandalorian, dont la diffusion sur Disney + rime avec succès depuis son lancement, point de départ d’une nouvelle route toute tracée.
Alors que se multiplient les annonces de séries ancrées dans l’univers Star Wars, d’Andor à Ahsoka en passant par The Acolyte, deux spin-offs particuliers ont attiré la curiosité. Tout d’abord Le Livre de Boba Fett, une courte parenthèse consacrée au plus célèbre des chasseurs de prime de la galaxie (un statut qui pourrait bientôt lui être ravi par Djinn Djarin, qui gagne en popularité) puis Obi-Wan Kenobi qui, au départ devait prendre la forme d’un ou plusieurs longs-métrages dans le plan initial de Lucasfilm. Au final, pour le premier, le spin-off télévisé s’est soldé par une déception dans la mesure où la série ne servait que de tremplin à la troisième saison de The Mandalorian, se contentant de remplissage concernant le guerrier ayant survécu au Sarlaac. De quoi craindre quelque peu la mise en avant de l’un des personnages les plus emblématiques de la saga, d’autant plus avec une session de réécriture à la clé. Le résultat est-il à la hauteur des attentes ?
Chronologiquement située une décennie après La Revanche Des Siths, Obi-Wan Kenobi avait pour tâche de nous éclairer sur les agissements du Jedi déchu durant son exile sur Tatooine, qui restaient flous dans le domaine du live action, tout en essayant de ne pas briser le fil de la continuité entre la prélogie et la trilogie originale. Autrefois pensé comme un film à part entière, ce voyage vers l’inconnu est devenu au gré du vent, et des ambitions de Lucasfilm, une série en six épisodes scénarisés par Joby Jarold et son pool d’auteurs – qui ont pris la suite de Hossein Amini, après que les producteurs aient décidé de partir vers une nouvelle direction. Au programme des réjouissances, la résurgence des fantômes du passé pour notre ancien chevalier/général, qui se voit confier une mission pouvant compromettre sa sécurité et le destin de multiples personnages.
En plus de garder un œil – à distance – sur le jeune Luke Skywalker, confié à son oncle Owen et sa tante Beru, Kenobi se retrouve dans le viseur de l’Empire en acceptant de venir en aide à un vieil ami, le sénateur Bail Organa, qui lui implore de retrouver sa fille adoptive Leia, enlevée par de mystérieux ravisseurs. De quoi forcer émotionnellement la main à notre héros, devant dès lors ressortir son sabre laser et s’éloigner de ce désert lui servant de prison à ciel ouvert pour secourir la fille de son ancien padawan. Pour corser le tout, ce cher Obi-Wan est dans le viseur de l’Empire et plus particulièrement des Inquisiteurs, des envoyés de Dark Vador, traquant et éliminant ceux les Jedi ayant survécu à l’Ordre 66 – qui a décimé la grande majorité de nos garants de l’équilibre dans la Force. Un postulat qui avait de quoi susciter l’intérêt, avec la promesse d’une rencontre entre le tragique et l’épique, telle la sombre conclusion de l’Episode III. Hélas, trois fois hélas, malgré un sujet ayant du potentiel, ce drame en six actes pêche par ses nombreuses faiblesses.
Obi-Wan Kenobi a en effet de quoi laisser perplexe, le plaisir de ces retrouvailles avec Ewan McGregor et Hayden Christensen étant gâché par une intrigue globalement bancale, où les bonnes idées se retrouvent ensevelies sous une succession d’absurdité en terme d’écriture – ce qui est clairement rageant. Passé un premier épisode posant tranquillement les bases et montrant la détresse de notre personnage principal, la série tente de faire progressivement grimper les enjeux, le sauvetage de Leia devenant rapidement une fuite en avant pour le Jedi et sa protégée, la menace émanant du côté obscur de la Force les contraignant à prendre des chemins de traverse pour revenir sains et saufs de ce périple mouvementé. Sauf qu’à essayer de gagner du temps, l’équipe de scénaristes en charge de la série multiplie les facilités, sacrifiant la dramaturgie de l’ensemble sur l’autel de la cohérence.
Alors que la tension aurait pu être au rendez-vous dans une ambiance crépusculaire, Kenobi n’étant plus que l’ombre de lui-même, affaibli par le poids des années et la culpabilité, on se surprend par moments à trouver le temps long, les différents chapitres de cette saison oscillant entre le bon et le mauvais tel des montagnes russes. En plus de digressions destinées à jouer la montre, notamment les passages où nos compagnons d’infortunes rejoignent les rangs d’une proto-résistance, des éléments cruciaux comme les Inquisiteurs se retrouvent à faire de la figuration, leur hiérarchie ainsi que leur mode de fonctionnement ne paraissant pas intéresser nos tête pensantes, hormis le cas Reva. La ‘cinquième soeur’ vole la vedette à ses camarades mais sa caractérisation est bien trop aléatoire pour pleinement convaincre, notamment lorsque le mystère planant autour de cette dernière se révèle au grand jour et ce malgré les efforts de Moses Ingram pour tenter d’apporter de la nuance en fin de parcours à une ennemie qui aurait mérité un meilleur traitement, avec un rôle tout en symbolisme, rejoignant la trame la plus intéressante de la série, celle du traumatisme de la chute de la République.
Le basculement d’Anakin Skywalker aura eu des répercussions dantesques à l’échelle de la saga Star Wars et Obi-Wan Kenobi n’oublie pas de nous le rappeler en confrontant le padawan et son maître, une rencontre mettant l’un et l’autre face à leurs choix, leurs démons. Le lien unissant à tout jamais ces deux frères resurgit alors que le seigneur Sith se dirige droit vers l’homme qu’il l’a laissé pour mort sur les cendres brûlantes de Mustafar avec une seule obsession. Se venger. Soit l’intrigue la mieux maitrisée, malgré les grosses ficelles en matière d’écriture, permettant de capitaliser sur la relation phare de la prélogie avec à la clé des règlements de compte et un duel attendu. La performance d’Ewan McGregor, qui est toujours impeccable dans la peau d’Obi-Wan et se donne à fond pour rehausser le niveau, de même que le retour sur le devant de la scène de Hayden Christensen, font de ces retrouvailles incandescentes un plaisir coupable. Apprécions l’effort de renforcer l’aura maléfique de Vador, à la manière de son apparition dans Rogue One, pour en faire un véritable danger. Sa présence est salutaire, aidant à apprécier à petites doses la série.
Clairement, il y a de véritables moments de bravoure le long des six épisodes qui composent le show mais qu’il est regrettable de voir que Lucasfilm et Disney ne se sont pas donnés à fond, alors que nous touchons au cœur de la franchise. Outre les incessantes fluctuations du scénario, la réalisation de Deborah Chow peine à trouver sens, son goût pour les plans caméra à l’épaule se révélant rapidement redondants et ses choix de mise en scène concernant l’action étant parfois déroutants, empêchant certaines séquences clés d’être visuellement clinquantes. L’utilisation du Volume, écran LED géant aidant à l’immersion, semble montrer ses limites avec un rendu faiblard, camouflé tant bien que mal par une photographie des plus sombres. Certes, cela amplifie la puissance des sabres laser lors des combats, le rouge et le bleu venant apporter un semblant de clarté à l’image mais cet artifice ne fait pas longtemps illusion face à des décors des plus épurés.
S’il est plaisant de revoir Ewan McGregor et Hayden Christensen se donner la réplique, Obi-Wan Kenobi n’est pas la série événement vendue par Lucasfilm car, malgré d’indéniables moments plaisants à suivre, la qualité est loin d’être au rendez-vous. La faute à cette volonté d’étirer un long-métrage de près de deux heures en une série en six épisodes, un format qui dans le cas présent ne convient pas, la qualité d’écriture étant des plus aléatoires et la réalisation aux fraises. Si tout n’est pas à jeter (Vador sauve l’honneur) mais difficile de ne pas se sentir floué sur la marchandise. Obi-Wan méritait mieux.