Deux ans après s’être faite repérée avec son court-métrage Maman(s), auréolé d’un César, la réalisatrice Maïmouna Doucouré s’attaque à son premier long avec Mignonnes, qui comprend au casting Fathia Youssouf, […]
Deux ans après s’être faite repérée avec son court-métrage Maman(s), auréolé d’un César, la réalisatrice Maïmouna Doucouré s’attaque à son premier long avec Mignonnes, qui comprend au casting Fathia Youssouf, Medina El Aidi, Esther Gohourou, Ilanah Cami-Goursolas et nous entraînant dans le quotidien de la jeune Amy, pré-adolescente dont la rencontre avec un groupe de danse va lui servir d’exutoire…
Avec Mignonnes, Maïmouna Doucouré signe un premier film lumineux qui traite avec pertinence de l’image de la femme dans notre société à travers le récit d’un passage à l’âge adulte.
Résolument féministe, le long-métrage brille par l’intelligence de son scénario, qui met en exergue la difficulté pour nos jeunes de grandir à une époque où l’hyper-sexualisation à une place prépondérante dans la vie de tout les jours. En évoquant cette thématique à hauteur d’enfant, de pré-adolescent dans ce cas précis, le scénario interpelle le spectateur tout en ayant la présence d’esprit de ne pas porter de jugement, ce qui donne de l’ampleur aux propos développés.
C’est dans ce contexte que nous suivons le parcours de la jeune Amy, onze ans, tiraillée entre ses problèmes familiaux et son envie d’émancipation. Rêvant de nouveaux horizons, elle va trouver une source d’évasion en se plongeant dans le domaine de la danse et en rejoignant une bande de fille menée par sa voisine Angelica, adeptes de chorégraphies bien loin de celles normalement apprises par celles de leur âge. Cette immersion au sein de ce groupe est l’occasion pour la scénariste/réalisatrice de montrer l’impact de la société sur la quête identitaire et plus particulièrement chez les jeunes, qui passent directement de l’innocence de enfance à la dureté du monde adulte, sans aucune transition. Entre recherche de popularité sur les réseaux sociaux, danses provocatrices et changement vestimentaire, la métamorphose de nos ‘Mignonnes’ dérange et invite à la réflexion quant à la perception de la féminité.
Que ce soit dans la sphère publique ou familiale, la place de la femme diffère selon l’éducation ou encore les croyances, une divergence de point de vue explicité là aussi avec finesse. Issue d’une famille religieuse où les traditions comptent, Amy voit deux mondes se confronter, compliquant de ce fait son rapport face à la féminité et à l’autorité. Pris en étau entre le conservatisme de ses proches et le progressisme du monde extérieur, la vision de notre danseuse en herbe quant à la personne qu’elle doit devenir s’en retrouve biaisée. Entre rites de passages et erreurs de jeunesse, l’équilibre propre à la maturité est difficile à trouver, ce que transpose parfaitement Maïmouna Doucouré dans cette première oeuvre, qui évite tout manichéisme et invite à la discussion.
Outre son scénario à l’écriture soignée, Mignonnes vaut également le coup d’oeil pour la performance de ses jeunes comédiennes, Fathia Youssouf en tête, qui transmettent une énergie débordante couplée à une sensibilité bienvenue, notre troupe de danseuses réussissant avec force à nous captiver dans leurs déambulations, grâce à une excellente direction d’acteurs. A retenir également, la réalisation de Maïmouna Doucouré qui est solaire, sa mise en scène colorée et riche en symbolismes ajoutant un cachet non négligeable à ce ‘coming of age’, filmant avec un certain esthétisme ce rapport au corps, pour mieux provoquer des réactions de la part du public, ce qui ne manque pas d’arriver.
Avec Mignonnes, Maïmouna Doucouré réussit avec brio son passage au long-métrage apportant un vent de fraîcheur au film dit de ‘passage à l’âge adulte’ en proposant une réflexion perspicace sur l’image de la femme et l’hyper-sexualisationdans notre société.Porté par une distribution solide et une réalisation maîtrisée, le long-métrage évoque avec justesse des problématiques inhérentes à l’adolescence et à l’envie d’émancipation.