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[Critique] The Medium, mauvais karma

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Six ans après One Day, le réalisateur Banjong Pisanthanakun se rappelle au bon souvenir de son public avec The Medium, qui vient de sortir en DVD, Blu-ray et VOD en France. Comprenant au casting Narilya Gulmongkolpech, Sawanee Utoomma, Sirani Yankittikan ou encore Yasaka Chaisorn, le long-métrage se centre sur le tournage un documentaire sur le chamanisme dans un village thaïlandais…

Passée une courte parenthèse dans le domaine de la comédie, Banjong Pisanthanakun revient à ses premières amours avec The Medium, variation du film dit de possession se reposant sur son cadre intimiste de même que sur les codes du found footage pour faire grimper progressivement le tensiomètre du spectateur. Le tout pour une virée en terre horrifique emprunte d’ésotérisme, trouvant davantage sa raison d’être dans la noirceur de son sujet que dans le traitement de son concept – qui montre rapidement ses limites.

Avec ce long-métrage, s’opère la rencontre entre deux noms du cinéma de genre asiatique, Pisanthanakun ayant travaillé de concert avec Na Hong-jin (The Chaser, The Strangers) pour élaborer cette histoire s’articulant sur le folklore thaïlandais. Chacun opérant dans un style différent, le scénario concocté par les deux hommes conjugue ainsi leur sensibilité, ce qui ressent à l’écran. L’un préfère aller droit au but quant à la démonstration, l’autre aime prendre son temps pour laisser l’horreur infuser, deux traits de caractère opposés qui tentent ici de s’attirer. Hélas, ce mariage – qui ne manque pas de potentiel – débouche sur un résultat contrasté, l’homogénéité n’étant pas au rendez-vous avec une intrigue ne sachant pas réellement à quel saint se vouer. D’où l’impression de regarder deux œuvres bien distinctes, se télescopant sur l’autel du frisson.

Prenant la forme du documenteur (comprenez par là faux documentaire), The Medium feint de s’intéresser à la culture chamanique en dressant le portrait de Nim, qui se fait le relais de la divinité Ba Yan et vient en aide à son prochain. Un angle de vue pour le moins intriguant où le surnaturel sert d’accroche à une exploration de ce large spectre qu’est la religion, qui va de la simple croyance à la dévotion. Choix scénaristique payant car posant calmement les enjeux qui prendront par la suite de l’ampleur tout en laissant infuser une atmosphère glaciale, destinée à nous préparer à un basculement vers l’obscurantisme. Quand de la brume se dissipe un héritage familial lourd de conséquences, le karma prend des allures de malédiction pour Nim et ses proches, avec l’apparente possession de sa nièce, point de départ d’une escalade vers le pire…

En pointant ses caméras sur l’inéluctable drame en approche, le film tend à noircir sa pellicule et opère un changement de tonalité, se consacrant alors à la décrépitude de la jeune victime, aussi bien corporelle que spirituelle. Une descente aux enfers s’accompagnant de l’incompréhension de tous face à la menace démoniaque se dressant devant eux, qui sert alors de fil conducteur à la seconde partie du métrage, bien décidé à se servir du matériel à sa disposition pour provoquer l’effroi. Hélas, malgré quelques montées d’adrénaline, difficile de réellement se laisser prendre à ce jeu malsain. La cause ? Les limites d’un sous-genre qui ne semble plus avoir de cartouches en réserve pour surprendre. Malgré les efforts considérables de Narilya Gulmongkolpech pour nous foutre les jetons, on ne se cramponne pas à son siège car à la longue, le found footage freine la narration. Dépassant les deux heures, le scénario de Banjong Pisanthanakun et Na Hong-jin rend obsolète le concept puisque la suspension d’incrédulité n’agit plus dès lors que la présence de l’équipe de réalisateurs pose question – avec des réactions dépassant l’entendement.

En résulte un dernier acte qui certes accentue ce sentiment d’épouvante qui émane de ce type d’intrigue mais oublie par la même occasion de se montrer inventif, se rapprochant notamment d’un style proche de Paranormal Activity pour conclure cette histoire de mauvais esprits sur une note violente, sanglante. Efficace mais terriblement prévisible au final, l’évocation du folklore thaïlandais n’aidant pas tellement à faire passer la pilule.

Avec The Medium, Banjong Pisanthanakun renoue avec le genre horrifique en conviant les mauvais esprits pour un film de possession qui, malgré ses sursauts, échoue à pleinement effrayer – la faute aux limitations du found footage.

© The Jokers Films