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[Critique] Kaamelott – Premier Volet, reprendre les armes

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Douze ans après refermer le dernier chapitre de son histoire à la télévision, Kaamelott repart en croisade, cette fois-ci sur grand écran, Alexandre Astier ayant pour ambition de conclure sa relecture des Légendes Arthuriennes sur grand écran. Pour s’y faire, un long-métrage – premier volet d’une trilogie – réunissant une bonne partie de la distribution de la série, avec la présence notamment d’Anne Girouard, Franck Pitiot, Jean-Christophe Hembert, Lionnel Astier, Joëlle Sevilla, Thomas Cousseau, Jacques Chambon et d’autres figures notables telles que Christian Clavier, Audrey Fleurot, Alain Chabat, Géraldine Nakache, Antoine de Caunes…

Arlésienne devenue réalité, après une décennie de flottement, l’adaptation cinématographique de Kaamelott avait fort à faire, devant parvenir à correspondre aux attentes d’une grande partie de sa fan-base tout en réussissant à attirer dans ses filets de nouveaux fidèles, le tout sans dénaturer l’esprit de la série qui a fait les belles heures de M6. Un challenge – aussi compliqué que celui de l’épée d’Excalibur, qu’a tenté de relever Alexandre Astier, voulant opérer un retour en grâce de sa création avec un Premier Volet destiné à raccrocher les wagons entre la fin de la série et cette nouvelle aventure au sein du royaume de Logres, pour un résultat malheureusement mitigé.

Avec l’ambition de conclure le mythe du Roi Arthur et les chevaliers de la Table ronde à travers une épopée en trois parties, notre maître d’arme en garde forcément sous le pied, l’idée avec ce long-métrage étant ainsi de renouer avec nos personnages et dénouer les intrigues laissées en suspens lors des deux derniers Livres du programme, pour ce qui s’avère être un chapitre introductif à la quête du Graal à venir. Ayant pour tâche de faire suite aux derniers évènements de la série, le long-métrage essaye de contenter aficionados et novices en se montrant facile d’accès scénaristiquement parlant, un point qui fonctionne plutôt bien il faut le reconnaître. Avec clarté, la descente aux enfers pour notre héros déchu, au plus bas après avoir laissé son trône et sa couronne à son ennemi juré – Lancelot – est évoquée – histoire de mettre tout le monde dans le même panier et de pouvoir avancer dans le récit sans que personne ne soit perdu en cours de route. Ainsi, à travers le périple de notre ex-souverain s’opère une (re)connexion avec les éléments clés de Kaamelott, de sa structure narrative à sa tonalité, le tout sous un nouveau format.

Si Alexandre Astier a su par le passé modifier la formule de la série en passant de pastilles de quelques minutes à une durée proche des standards télévisuels, cette fois la transformation s’avère moins fluide, la faute à un scénario manquant d’envergure. Certes il est plaisant de revoir à l’écran cette brochette de protagonistes que nous avons eu le plaisir de suivre pendant quatre-cent-cinquante-huit épisodes, de Perceval, Karadoc, Guenièvre, Léodagan à la Dame du Lac en passant par des protagonistes récurrents à l’image Dagonet, le Duc et la Duchesse d’Aquitaine sans oublier le Jurisconsulte, mais au final, il manque quelque chose de fondamental à ces retrouvailles. Une réelle dose d’émotion. En cumulant trop de protagonistes, le scénariste/réalisateur fait souvent du sur-place niveau développement, privilégiant sons sens aigu du dialogue au profit de l’avancée de son intrigue centrale. Les répliques fusent comme au bon vieux temps, servant principalement le tandem Percevel/Karadoc, sauf que l’on a du mal à s’impliquer dans la rébellion qui se noue, alors que ce conflit est le cœur du long-métrage.

Au milieu de ce royaume fracturé, en proie au désarroi après une décennie de règne de la part du vil Lancelot, la lueur qu’aurait dû symboliser la résurgence d’Arthur Pendragon prend la forme d’une petite étincelle, alors qu’il y avait là l’occasion de proposer de l’heroic fantasy de qualité. La reprise du trône de Kaamelott manque ainsi cruellement de densité, alors qu’elle est censée être cruciale mythologiquement parlant, devant marquer avec intensité le retour aux affaires de l’ancien Roi. Si l’on conçoit que faute d’un budget à la hauteur des attentes, la pédale douce a été de mise concernant les effets spéciaux – qui piquent parfois aux yeux – niveau réalisation, le problème est tout autre. Alexandre Astier a du mal à se défaire de ses automatismes en matière de mise en scène, continuant à se contenter d’un champ/contre-champ accouplé à un montage haché, qui pénalisent grandement le rythme général de son film. Un énorme point faible qui annihile à la fois la dimension émotionnelle et épique qu’il tente parfois d’apposer sur son scénario. Preuve en est, lorsqu’il laisse tourner sa caméra et prend le temps de construire une séquence, comme celle charnière entre Arthur et Guenièvre, il y a du mieux.

Devant faire la jonction entre le petit et le grand écran, Kaamelott – Premier Volet avait une lourde tâche à accomplir en devant rassurer les fans et plaire au grand public. Une mission en partie réussie car si Alexandre Astier renoue avec l’esprit de sa série culte, notre chef d’orchestre a du mal à coordonner tous ses postes, son scénario manquant de force et sa mise en scène de panache. En tout cas, malgré ses défauts évidents, cet épisode introductif n’en reste pas moins sympathique à suivre, posant les bases d’une trilogie qui a du potentiel. On le sait, Alexandre Astier en garde sous le pied et l’on espère qu’il pourra proposer une quête du Graal à la hauteur de son ambition dans les deux prochains opus.

© SND