Trois ans après Le Retour Du Héros, Laurent Tirard fait son retour derrière la caméra avec Le Discours, adaptation du roman éponyme de Fabcaro réunissant à l’écran Benjamin Lavernhe, Sara Giraudeau, Kyan Khojandi, Julia Piaton, François Morel, Guilaine Londez et nous faisant suivre les élucubrations d’Adrien, coincé à un repas de famille alors qu’il attend un message important…

Relevant le défi de porter sur grand écran un roman qui était annoncé comme inadaptable de par sa forme, Laurent Tirard ne démérite pas et s’en sort avec les honneurs avec Le Discours, qui est une comédie à la fois douce et acerbe sur la vie et ses petites contrariétés, qui doit sa qualité première à la verve d’un Benjamin Lavernhe impeccable, pouvant compter sur une réalisation inspirée pour mettre en avant ses multiples talents.

Véritable exercice de style, le long-métrage avait pour tâche de maintenir l’intérêt de son auditoire face à ce qui relève du monologue pur et simple, l’intrigue tournant majoritairement autour des états d’âmes d’un seul protagoniste. Pour se faire, Laurent Tirard, qui officie également à l’écriture du script, multiplie les digressions, qu’elles soient visuelles ou scénaristiques, afin de créer une connexion avec le spectateur et d’instaurer un climat de confiance – ce que permet notamment la disparition du quatrième mur, concept qui à ici sa place légitime. Ainsi, nous suivons Adrien, qui a vu son petit monde s’écrouler à la suite d’une pause dans sa relation avec Sonia, actée par cette dernière. Un évènement que ressasse sans cesse notre homme et qui trouve son apogée dans un repas de famille, qui va nourrir ses angoisses et ses doutes.

Alors que notre héros est dans l’attente d’une hypothétique réponse de sa dulcinée après une tentative de renouer le contact, notre cœur brisé va devoir digérer la proposition de son beau-frère, qui aimerait que celui-ci prononce un discours pour le mariage de sa sœur. Ces deux évènements sont les déclencheurs d’une remise en question interne d’Adrien, qui analyse avec causticité les rapports familiaux tout en se replongeant en détails dans sa romance avec la femme qu’il aime. Un rétrospective mémorielle qui parlera à beaucoup, l’accent étant mis sur l’universalité des sentiments humains, chacun pouvant se retrouver dans ces petits tracas du quotidien qui emmaillent notre existence. Des difficultés de tisser des liens avec nos proches en passant par les épreuves pouvant être vécues par un couple, Le Discours joue sur la familiarité pour tenter de remporter l’adhésion, ce qui fonctionne (d’autant plus lorsque la question de la fameuse chenille – un incontournable des mariages – est abordée !).

En se démenant pour apporter un semblant de fraîcheur à sa mise en scène, Laurent Tirard parvient à sortir du carcan du huis-clos et évite le piège du faux rythme avec un nombre conséquent de trouvailles pour sortir de ce dîner, lieu central du film et souligner l’agitation émotionnelle d’Adrien, ce qui se traduit une succession de chemin de traverse pour aérer l’esprit du spectateur – mais pas celui de notre personnage principal. Dans la peau de ce dernier, Benjamin Lavernhe démontre une fois de plus son talent, portant avec une énergie folle Le Discours sur ses épaules. Si Sara Giraudeau, Kyan Khojandi, Julia Piaton, François Morel et Guilaine Londez ne sont pas en reste, c’est indéniablement notre pensionnaire de la Comédie-Française qui est sous le feu des projecteurs avec à la clé une excellente prestation et l’utilisation une large palette de jeu – oscillant entre légèreté et mélancolie, ce qui renforce l’affect du public pour son alter-ego. Le comédien est ans conteste la carte maîtresse du long-métrage.

Avec Le Discours, Laurent Tirard livre une adaptation pétillante et dynamique du roman éponyme de Fabcaro, évitant les pièges se mettant sur son chemin pour réussir sa mission première : nous divertir avec légèreté et sensibilité sur les affres de la vie à travers un monologue intérieur déclamé avec ferveur par un Benjamin Lavernhe en grande forme, trouvant un écrin de choix pour confirmer son talent.

© Le Pacte

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