Deux ans après Solo : A Star Wars Story, Ron Howard est de retour derrière la caméra pour porter à l’écran – pour Netflix – Hillbilly Elegy, roman autobiographique de J.D. Vance devenu rapidement un best-seller lors de sa sortie en 2016. Intitulée chez nous Une Ode Américaine, cette adaptation comprend au casting Amy Adams, Glenn Close, Gabriel Basso, Haley Bennett, Owen Asztalos, Freida Pinto et nous entraîne dans l’état de l’Ohio pour brosser le portrait d’une Amérique désœuvrée…

Avec Une Ode Américaine, Ron Howard livre un mélodrame sur l’adversité qui ne trouve pas la bonne distance pour traiter avec justesse de son sujet, préférant se concentrer avant tout sur la performance de ses comédiens plutôt que sur la finesse du scénario et de la réalisation, donnant lieu à une chronique familiale classique et frôlant le voyeurisme.

Lorsque l’autobiographie de J.D. Vance Hillbilly Elegy a débarqué en librairie en 2016, son succès fût immédiat, son ouvrage ayant été perçu par beaucoup comme le reflet d’une Amérique oubliée. Une Amérique qui aura d’ailleurs un rôle crucial cette année-là puisque les voix d’Etats tels que ceux de la Rust Belt (comprenant notamment l’Ohio, le Kentucky, la Pennsylvanie) auront aidé à installer Donald Trump à la Maison-Blanche. Une fracture sociale et politique qui se retrouvait en filigrane dans le témoignage de l’auteur, qui retraçait son parcours et celle de sa famille, dans un quotidien où pauvreté et violence étaient la norme. Une dimension culturelle et sociologique qui ne transparaît pas dans le scénario d’Une Ode Américaine, écrit par Vanessa Taylor (La Forme De L’Eau), qui a essayé de gommer cet aspect pour mettre en avant la force des liens forgeant la cellule familiale, que ce soit pour le meilleur ou pour le pire.

Ainsi, durant près de deux heures, passé et présent s’entremêlent alors que notre héros J.D. Vance, est à un croisement de sa vie. Alors qu’il est le point de décrocher un stage prestigieux dans un cabinet d’avocats, notre étudiant de Yale se voit rattraper par son passé alors qu’il apprend que sa mère a fait une overdose. S’impose de ce fait un retour au bercail, synonyme d’introspection pour ce dernier, servant à lui rappeler d’où il vient et comment il est parvenu à devenir l’homme brillant qu’il est désormais. De ces retrouvailles compliquées entre J.D. et sa génitrice, le long-métrage nous dresse le portrait de trois générations où haine et amour se confondent, cherchant à démontrer qu’à travers les épreuves de la vie et la misère, on peut tout de même réussir à s’en sortir. Un constat qui aurait pu être pertinent à suivre si, au lieu de chercher à véhiculer par tous les moyens de l’émotion et de l’empathie, Ron Howard et son équipe avaient pris le recul nécessaire pour raconter cette histoire dramatique avec finesse. En évitant au maximum tout propos politico-social et un quelconque esprit d’analyse, qui aurait pu aider à mieux comprendre les personnages, Une Ode Américaine se contente d’observer les dérives d’une famille dysfonctionnelle, d’où un certain malaise devant certaines séquences.

Dans un sens, on peut comprendre les mauvaises critiques reçues de la part de la presse outre-Atlantique qui semble avoir été échaudé par l’absence de nuances et la description des classes défavorisées. On reconnaît une certaine maladresse de la part de Ron Howard concernant le regard apposé sur cette catégorie sociale, qui peut prêter parfois à confusion quant au message véhiculé. Le portrait de ces laissés pour compte devant composer avec le peu qu’on leur offre n’est pas reluisant mais l’on ne parvient pas réellement à s’attacher aux déconvenues de la famille Vance, la faute à une écriture un peu pataude. On distingue la volonté de décortiquer l’être humain dans sa complexité mais tout est amené avec de gros sabots que l’on ne se laisse pas emporter par cette détresse ambiante ressortant de cet engrenage malheureux qui emportent nos personnages et ce malgré les performances remarquées d’Amy Adams mais surtout de Glenn Close, qui se démènent pour nous émouvoir, entre jeu à la limite de l’hystérie – par moments – pour l’une et interprétation plus sensible pour la seconde qui campe avec force une matriarche dure et douce (le tout à grand renfort de maquillages et prothèses).

En se contentant de n’être qu’un spectateur de cette chronique, Ron Howard reste sur ses acquis en matière de mise en scène et se repose principalement sur ses acteurs pour alimenter son long-métrage et tenter de provoquer l’émoi du public. Nous traversons les décennies sans aucune recherche visuelle ni aucune poésie, la photographie étant terne et les transitions se contentant de fondus au flou ou enchaînés. La réalisation aurait gagné à être plus incarnée pour que nous puissions adhérer à cette histoire trans-générationnelle qui avait du potentiel. Notons qu’il y a tout de même certaines séquences marquantes à l’image de celle où le jeune J.D. essaye de fuir sa mère après une dispute qui a complètement déraillé, amenant celui-ci à fuir chez des inconnus. Dommage que Howard ne sache pas du tout comment appréhender ce drame, se vautrant dans une facilité et un voyeurisme finissant par être irritant.

© Netflix

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